– … Comment évaluer le «prix’ de la nature ?
On évoque depuis des décennies les dégâts causés à la biodiversité, mais l’estimation du coà’t de ces impacts est difficile à réaliser. La méthode privilégiée à l’heure actuelle repose sur l’estimation du coà’t du «service rendu’ par la nature. Par exemple, la valeur des zones humides peut être estimée à partir de leur fonction d’épuration des eaux usées et de prévention des inondations. Dans les années 90, la ville de New-York a ainsi réalisé de fortes économies en renonçant à construire une station d’épuration et en optant pour la restauration des milieux naturels sur ses bassins versants. Parmi les autres services rendus par la nature figurent la capacité de stockage du carbone pour les forêts, la régulation du climat, la fourniture de ressources naturelles, la pollinisation, etc.
– Que révèlent les études scientifiques?
Une étude publiée dans la revue Nature a évalué la valeur de l’ensemble des biens et services rendus par la nature à deux fois la valeur du PIB mondial. D’après l’étude menée par Millenium Assessment avec l’appui du Pnue (Programme des Nations unies pour l’environnement), 60% des «services écologiques’ seraient déjà dégradés dans le monde. Sur le modèle du rapport Stern concernant le changement climatique, l’étude européenne Teeb propose d’évaluer le prix de l’inaction face à l’érosion de la biodiversité. Il faut en effet renforcer les connaissances scientifiques sur l’évaluation des services rendus par les écosystèmes pour pouvoir intégrer ce coà’t dans l’analyse financière des projets d’entreprises. Si nous parvenons à établir une expertise scientifique validée à l’échelle internationale, à l’instar des travaux du Giec, nous pouvons espérer un fort impact sur le monde économique. C’est l’objectif du projet ImoSeb, équivalent du Giec pour la biodiversité…
– Et le risque de marchandisation de la nature ?
L’idée de donner un prix à la nature peut soulever des questions éthiques, mais l’essentiel est de garder en tête l’objectif final: la sauvegarde de la biodiversité à l’échelle de la planète. Le véritable piège consisterait à vouloir compenser la perte d’une espèce dans une zone par un «gain’ dans une autre. Un dommage sur le littoral ne pourra évidemment pas être compensé par la replantation d’une forêt dans les Alpes… A terme, la création d’un système de compensation sur le modèle du marché carbone pourrait voir le jour, même si c’est nécessairement plus complexe en raison de la multiplicité des critères.
– Quelles résolutions le congrès de Barcelone a-t-il adoptées?
Une dizaine de recommandations, destinées en premier lieu à l’industrie extractive minière et pétrolière dont les impacts sur l’environnement sont considérables, principalement dans les pays en développement ont été votées. Nous souhaitons également l’harmonisation et le renforcement des réglementations concernant les aires protégées et des règles de protection des populations locales.