Le jour où la ressource marine deviendra, à l’image du thon rouge sur les marchés asiatiques, un objet de spéculation financière, c’en sera fini des pêches artisanales et d’un des principaux aliments protéinés pour les populations les moins fortunées. Or la création de droits de pêche monétarisables et transférables est le plus sà’r moyen de faire entrer cette ressource naturelle dans la gamme des articles et procédés fallacieux – et pourtant légaux – qui provoquent les crises financières, et de faire basculer l’activité « réelle » de la pêche dans le monde, fictif et spéculatif, de la finance actuelle… Tout au contraire, la re-régionalisation, dans laquelle s’intègrent parfaitement des pêches artisanales territorialisées offre une grande perspective d’avenir face au surenchérissement du pétrole et aux conséquences climatiques des émissions de CO².
1°) Les outils et procédés qui engendrent les crises financières
– En 2007, aux USA, des prêts immobiliers, gagés sur les maisons, avaient été accordés en grand nombre à des familles pauvres, à des taux très élevés (15 à 30%). Le remboursement de ces « subprimes » était basé sur l’octroi de nouveaux prêts liés à l’augmentation continue de la valeur des maisons. Suite à une hausse du taux d’intérêt à court terme, les maisons ont pris moins de valeur, acculant de nombreux ménages, et par suite les établissement de crédit, à la faillite.
– Titrisation et millefeuille, les outils de propagation des crises : la titrisation est la possibilité de céder vos créances et donc d’en faire des actifs financiers. Le millefeuille est un ensemble de créances qui est négocié en bloc. Avec ces outils, les informations sur la solvabilité des débiteurs se perd. Par ailleurs, il est mathématiquement impossible de calculer la corrélation des risques de faillite entre les débiteurs, et les agences de notation des actifs financiers sont généralement optimistes dans leurs évaluations car payées par les banques… Par ces procédés, la crise financière de 2007 aux USA s’est étendue aux autres continents.
– Les CDS ou couvertures de défaillance (Credit Défault Swap) et la faillite de Lehman Brothers : les CDS sont des actifs financiers qui servent de contrat d’assurance sur des personnes ou des institutions, et qui sont échangeables sur des marchés de gré à gré (marchés non centralisés et non transparents). C’est ainsi que la banque CIT, une grande banque américaine de prêt aux PME, s’étant trouvée obligée d’emprunter à la banque Goldman Sachs, suite à la tourmente des « subprimes », s’est vu refuser la renégociation de son emprunt, ce qui l’a poussé à la faillite. Goldman Sachs avait, au moment du prêt, « assuré » sa créance et gagnait plus d’argent avec la faillite de son débiteur. Idem pour la faillite de Lehman Brothers dont la dette avait été assurée 50 fois. La planète a du rembourser 50 fois ceux qui avaient souscrit des assurances sur Lehman… Si l’on considère que de nombreux CDS ont été activés sur la Grèce, des gens gagnent aujourd’hui de l’argent au fur et à mesure que la Grèce s’effondre. Paradoxalement, on parle beaucoup de la Grèce qui représente moins de 3% du PIB européen et peu de la situation financière de la Californie qui pèse dix fois la Grèce…
– Les taches solaires : les marchés financiers sont constamment traversés par des phénomènes (comme les taches noires visibles à la surface du soleil et qui sont liées à la différence de température de la lave en fusion) qui n’ont rien à voir avec l’économie et la finance mais qui jouent sur les cours, uniquement parce que les traders pensent que tout le monde va croire en des signes avant-coureurs. C’est ainsi que, lors d’une visite protocolaire en 2002 au Japon, G. Bush avait parlé de « dévaluation » au lieu de « déflation » lors d’une conférence de presse. En quelques heures, le yen avait perdu 2 à 3% par rapport au dollar. Il avait fallu une contre-conférence du Premier Ministre japonais pour rétablir le cours du yen. Si tout le monde se convainc que l’euro va baisser, vous avez intérêt à vendre et vous contribuez à la baisse de l’euro…
– L’évaluation contestable des bilans bancaires : Fin 2008, pour la plupart, les banques européennes d’investissement font faillite et se renflouent auprès des Etats. Bizarrement, au 1er semestre 2009, elles engrangent des profits et se redistribuent des bonus exorbitants… Petite explication : depuis 2005, sous la pression des banques allemandes, l’évaluation des actifs, dans une entreprise cotée, doit se faire à leur valeur de marché et non plus sur la base de l’actualisation des intérêts qu’ils rapportent. Ainsi, la valeur des bilans de ces entreprises cotées dépend désormais des taches solaires qui ravagent les marchés financiers… Suite à l’effondrement des prêts immobiliers américains dont les valeurs s’effondrent sur les marchés, les bilans des banques passent au rouge. Alors, l’IASB (un institut privé, payé par les banques, et chargé par la Commission Européenne d’édicter les normes comptables (!)) autorise exceptionnellement les banques à ne plus enregistrer ces actifs toxiques et ces créances douteuses à leur valeur de marché. Ils sont évalués à des valeurs en partie fictives, des valeurs théoriques calculés par des matheux… C’est grâce à ces maquillages que les banques irlandaises passent avec succès le test de fiabilité des banques en été 2010, ce qui ne les empêchent pas de faire faillite 6 mois après…
2°) Une distorsion néfaste entre l’économie et la finance
Depuis les années 80, à la sortie des 30 glorieuses d’après guerre, les pays industrialisés s’engagent dans une faible croissance (hausse du PIB de 2 à 4% par an), avec une faible inflation (2 à 4% par an, hormis les poussées du choc pétrolier et du passage à l’euro), une faible progression du pouvoir d’achat, et un chômage de masse qui légitime la pression salariale. Parallèlement, les revenus financiers explosent tout comme la taille des marchés financiers liée à leur déréglementation. Il en résulte un creusement phénoménal des inégalités : l’écart des revenu au sein des entreprises atteint parfois un rapport de 1 à 2000 (il était de l’ordre de 1 à 20 au début du 20ème siècle, et de 1 à 50 après la seconde guerre mondiale). Comme nous l’avons vu, les crises financières sont provoquées par le développement du crédit hypothécaire et plus généralement du crédit à la consommation, et des techniques de tritrisation, millefeuilles et notations corrompues. Face à la mauvaise santé des banques et des Etats, les marchés financiers se tournent vers les matières premières : pétrole, riz, soja, blé… avec pour conséquences des phénomènes de taches solaires qui se traduisent par de fortes variations sur les prix de ces matières. Alors que l’offre et la demande de pétrole sont très stables, le prix du baril peut doubler et rebaisser en quelques semaines, ce qu’il s’est passé en 2008. Le marché financier du pétrole pèse 30 fois plus que le marché réel… Combien d’entreprises pourront supporter ces surcoà’ts artificiels, et pendant combien de temps ? Imaginez que les droits de pêche soient prises dans ce genre de tourmente…
Plutôt que de continuer à imaginer des outils de spéculation dans tous les domaines, il devient urgent de réaffirmer le pouvoir de l’autorité politique et de recadrer nos marchés financiers. Aujourd’hui, pour financer la faillite des Etats, le Fond de stabilité européen lève des fonds sur les marchés financiers. Or, ces obligations européennes sont garanties par l’Allemagne et fixées à un taux supérieur à celui que rapporte la dette publique allemande, cela revient à payer grassement les marchés financiers. La Banque Centrale Européenne (BCE), dotée du pouvoir de création monétaire, est indépendante des Etats. Ce qui signifie qu’elle doit passer par les marchés financiers (en payant des commissions bancaires) pour acheter les dettes publiques des Etats européens. Ce faisant, elle est soumise au bon vouloir de ces marchés et aux nombreuses taches solaires qui les agitent…
3°) Re-régionalisation et baisse du commerce international
Bien que les réserves pétrolières soient suffisantes au moins pour le siècle à venir, les capacités d’extraction baissent avec l’âge des puits, ce qui l’imite l’offre journalière tandis que la demande augmente. D’après plusieurs ingénieurs, les perspectives ouvertes par l’exploitation du gaz de schiste ne suffiront pas à combler cette déplétion, tout en causant de grands problèmes environnementaux (la roche est pulvérisée par de l’eau dense, c’est à dire pleine de cochonneries, qui reste dans la terre…). L’augmentation du prix du pétrole devrait se traduire par une diminution du commerce international, du fait du coà’t élevé du transport routier entre les ports et les centres de distribution. Réaménagement du territoire français avec développement du ferroutage et des transports publics, ré-industrialisation verte du tissu économique européen, revalorisation de la pluri-agriculture (et de pêches artisanales diversifiées) seront les solutions de demain, à condition de les préparer dès aujourd’hui. Si nous devions attendre une crise énergétique majeure et que nous devions être dépendants d’importations devenues très chères, nous deviendrions soumis à la puissance financière internationale, celle de la Chine par exemple…