Bonne nouvelle, la Ministre de l’environnement suspend le projet Abyssea. Les élus du Lavandou s’inquiétaient de ce projet relativement « opaque » et de sa situation, ils avaient voté une motion. Avec eux, d’autres élus du littoral, les Verts, les collectifs citoyens, des personnels du Parc national de Port-Cros, ainsi que les prud’hommes varois dont plusieurs ont répondu à l’enquête publique (voir ci-après). Vu l’impact d’un tel projet, mieux vaut surveiller en quels points du littoral il pourrait resurgir.
Enquête publique réponse des Prud’homies de Bandol, Sanary, Le Brusc, La Seyne sur mer – St Mandrier, Giens, Antibes – Golfe Juan :
Les pêcheurs de nos prud’homies sont très inquiets des impacts que pourraient entraîner la construction et l’exploitation de ces stations et s’opposent, en conséquence, à un tel projet.
La construction et l’exploitation de ces stations entraîneront nécessairement des troubles et des perturbations des écosystèmes marins et de la biodiversité marine : turbidité de l’eau, remise à jour de sédiments enfouis qui peuvent être chargés en métaux lourds, cyanobactéries… et qui auront un impact sur la chaîne marine et le plancton, enfouissement des espèces, mise en suspension des sédiments qui modifie la production planctonique, fuite des espèces marines notamment par le bruit et les recherches sismiques, risques de contamination chimique ou microbiologique, risques sismiques
Le site choisi se situe à proximité d’une zone de pêche exploitée depuis longtemps par les pêcheurs : le Manteau. De par l’étroitesse du plateau continental, nos zones de pêche sont déjà très réduites et nous ne pouvons nous permettre de les réduire ou de les dégrader. Nos droits de pêche sont des droits d’usage conciliables avec d’autres usages (navigation, loisirs) alors que ce type d’investissement tend à privatiser les zones au détriment de toutes les autres activités.
De plus, ce projet se situe dans des zones protégées : à l’intérieur du sanctuaire des mammifères marins, dans l’aire adjacente marine du Parc national de Port-Cros et au sein de territoires prud’homaux. Les pêcheurs professionnels, par le biais de leurs prud’homies, ont toujours eu à cœur de préserver la richesse de leurs zones de pêche, telles qu’en témoignent les archives prud’homales et la qualité des eaux littorales varoises. Outre les règlements prud’homaux qui aggravent les réglementations nationales et européennes, les pêcheurs se sont investis dans diverses actions contraignantes. Pour la protection des dauphins, ils se sont engagés dans un suivi scientifique de la pratique des filets dérivants ; ils ont été les premiers à utiliser des répulsifs (pingers) ; ils ont finalement, pour des raisons politiques, dus se reconvertir à d’autres techniques (palangre, ligne). Partenaires du Parc de Port-Cros, ils sont signataires d’une charte qui définit très précisément les engins autorisés et les titulaires d’une autorisation à travailler dans la réserve. Engagés dans les sites Natura 2000, ils participent aux mesures destinées à protéger les espèces classées. Tous ces efforts pour la préservation de l’environnement ne doivent pas être balayés d’un coup au profit d’un investissement industriel et militaire de grande ampleur.
Ce projet paraît totalement démesuré pour le bassin méditerranéen et peu adapté à une transition qui devrait déboucher sur des énergies renouvelables. En effet, d’après le site du Pôle Mer Méditerranée, « ces dispositifs ouvriront d’importantes perspectives aux industries pétrolières et minières ‘. Le nombre de plateformes est déjà important dans un bassin qui est presque fermé et qui met du temps à se renouveler. Un accident sur une plateforme pétrolière – sans parler de l’impact considérable sur la biodiversité des extractions minières, lié notamment à la diffusion du panache et à la remontée de sédiments dangereux – pourrait ruiner l’économie littorale (dont la pêche) sur une grande échelle. Il est important de considérer de tels projets, non uniquement dans une logique de développement local, mais relativement à l’ensemble du bassin méditerranéen et des risques à venir. Par ailleurs, dans notre contexte environnemental, il est réellement stratégique de s’orienter vers des énergies renouvelables.
Enfin, un tel projet, compte tenu de son ampleur, du coà’t qu’il représente, de la stratégie et de la dynamique dans lesquelles ils s’insèrent, doit nécessairement être largement débattu, démocratiquement, au sein des organisations professionnelles de la pêche, comme de toutes organisations citoyennes. Ce n’est pas le cas avec les conditions de cette enquête publique limitée à 2 communes côtières, dans un laps de temps limité. Lié à des activités militaires, on peut se demander également quel contrôle réel pourrons-nous avoir sur ce projet, sur les activités menées et sur leurs impacts.