Ce livre du scientifique Henry Augier, paru récemment aux éditions Libre et Solidaire, développe un aspect méconnu des Calanques, et de ses conditions environnementales, alors que ce site reste marqué dans ma mémoire de citadine marseillaise comme étant l’un des plus beaux du monde ! On ne naît pas marseillaise impunément…
L’auteur débute par quelques pages sur la chasse et met en évidence l’anachronisme du parc qui interdit aux promeneurs de ramasser des pâquerettes ou de promener leur chien sans laisse alors que les chasseurs -et probablement leurs chiens- vaquent librement, prompts à tuer la faune sauvage.
Il rappelle ensuite que la partie proche de la rade marseillaise a longtemps été un site industriel chimique et qu’il en reste des vestiges plus que critiques : déchets industriels, chargés en métaux et métalloïdes toxiques, stockés, utilisés en remblais, ou en coulées jusqu’à la mer, pollution des sols, des sédiments et de la mer… Henry Augier déplore que la création du parc n’ait servi à accélérer les travaux de dépollution et de réhabilitation (dont la calanque de Samena pour ceux qui connaissent).
Avec la triste histoire des rejets urbains de Cortiou, on touche l’apothéose : avant 1987, les égouts d’un million cinq cent mille habitants se déversaient directement dans les calanques, avec un débit de 5 à 6 m3/s, soit 1 million de litre d’urine, 400 t d’excréments, 400 t de détergent, 3 t d’hydrocarbures, 4,5 t de chlore par jour… Outre les eaux usées, se déversaient les effluents industriels de près d’une centaine d’usines. Avec la station d’épuration, non efficace à 100 %, « les effluents rejetés en mer contenaient encore une charge importante en produits toxiques et difficilement dégradables (métaux lourds, détergents, pesticides…) ». Ce n’est qu’en 2008 que la station a été dotée d’un traitement secondaire biologique, complémentaire du traitement primaire physico-chimique. Mais au lieu d’envisager un traitement tertiaire de finition permettant d’éliminer totalement les rejets polluants en mer, la ville s’est tournée vers un émissaire au large et en profondeur. 15% des détergents, « des tensioactifs durs », très toxiques pour la faune et la flore se retrouvent toujours en mer, tout comme des hydrocarbures, des alkylphénols-polyéthoxyles, des PCBs, des métaux (mercure, cadmium, plomb…), des substances pharmaceutiques (anti-inflammatoires, antidépresseurs, perturbateurs endocriniens)… Cette question devrait être l’une des priorités du parc.
Enfin, l’accord du Conseil d’Administration du Parc pour le rejet des eaux polluées de l’usine d’alumine de Gardanne est un scandale soulevé par l’auteur qui s’interroge sur l’importance et la composition du conseil d’administration du parc et sur le nouveau statut des parcs nationaux (suite à la loi du 14/4/2006).
Un petit livre, facile à lire et qui, par les informations qu’il donne, permet d’avoir une bonne vision des points à mettre en avant pour tous les citoyens, amoureux de ce site montagneux situé en périphérie de la deuxième ville de France, et aussi dans le cœur de tous ceux qui y ont crapahuté.