Suite à un projet de proposition d’interdiction des filets dérivants par le Parlement européen, les prud’hommes d’Antibes – Golfe Juan et de Sanary sur mer ont écrit au Président de la commission pêche du Parlement européen qui leur a répondu :
Prud’homie de Sanary sur mer : « Nous vous confirmons que, traditionnellement, depuis des siècles, il existe dans toutes les prud’homies un panel de filets dérivants adaptés à chaque type d’espèces. Ces engins ont de tous temps été considérés par les prud’hommes comme les moins impactant pour l’environnement. Ils font partie du patrimoine de la pêche artisanale méditerranéenne. Il n’y a aucune raison environnementale d’interdire ces engins. Leur suppression aurait des conséquences néfastes pour le devenir des petits métiers qui pratiquent une pêche parmi les plus « durables » qui soient. La longévité de ces petits métiers, et la qualité des fonds rocheux provençaux en témoignent.
Réduire le panel de nos techniques artisanales, c’est attenter à notre polyvalence qui est la seule façon pour nous de nous adapter, au jour le jour, aux conditions environnementales et aux exigences de nos clientèles locales. Nous exerçons des techniques parmi les plus artisanales, à propos de zones de pêche souvent très restreintes. Pardon de n’avoir pas de marées, de grands plateaux continentaux, de n’être pas « spécialisés » dans des techniques intensives. La gestion des pêches intensives ne peut nous être appliquée, ce serait programmer notre disparition.
Nous sommes surpris que quelques politiques puissent, de loin, remettre en cause des siècles d’une gestion de terrain faite par les prud’hommes, sans aucune observation des pratiques locales en lien avec leurs territoires. C’est une négation des liens culturels et vivriers que les hommes ont développé avec leurs écosystèmes. Nous vous sommes reconnaissants de bien vouloir nous soutenir dans notre volonté de préserver notre patrimoine, notre gestion et nos métiers.
NB : La plupart de ces filets sont très fins avec de petites mailles et il n’y a aucun risque de prendre un thon ou un mammifère avec ces engins. »
Prud’homie d’Antibes – Golfe Juan les Pins : « A travers ces nouvelles aberrations il en ressort trois points principaux :
1) Nos hauts dirigeants ne connaissent même pas la puissance physique des thons, puisque nous sommes supposés capturer des thons dans les filets fragiles dérivant que nous employons pour les sardines ,anchois, liches ou autres.
2) La pêche française est à nouveau bafouée par nos instances du fait que l’on ose prendre en compte l’avis des Espagnols qui sont le plus mauvais exemple de respect en matière de règlementation de pêche européenne.
3) Les dates qui nous sont proposées pour réagir ne nous laissent même pas une dizaine de jours pour ce faire. Ce qui signifie tout simplement que tout est décidé d’avance et qu’une fois encore ce genre de restriction n’a qu’un seul but : faire mourir la pêche artisanale.
Quand verrons nous enfin débarquer, chez nous pêcheurs, ces hauts fonctionnaires avec un ciré et des bottes pour venir en mer avec nous partager nos expériences de terrain et constater la réalité du terrain ? A force de contraintes et de restrictions la pression ne cesse de monter et les conflits entre pêcheurs et plaisanciers risquent de s’accroitre…
Quand on entend parler de 29 tonnes de thon pour la plaisance et qu’en même temps se profile une interdiction des filets dérivants pour ne pas risquer de capturer un thon rouge, alors qu’il y a très peu de chance d’en attraper avec ce type d’engin, on est en droit de se demander qui est le dindon de la farce…
Il ressort de tout ce CARNAVAL que notre Etat est le petit soldat de l’Europe et nous nous demandons sincèrement si ces gens n’ont pas déjà vendu notre pêche aux autres pays limitrophes ou si ces derniers ne veulent pas en fin de compte, comme dit précédemment, supprimer simplement et purement les petits pêcheurs Méditerranéens.
Pour revenir sur les textes :
Dans nos petits ports de pêche, nombreux sont ceux qui travaillent avec 1500 à 2000 mètres de filets dormants et qui le matin vont aux filets dérivant pour espérer capturer un petit complément.
Sur nos embarcations qui font en moyenne de 6 à 10 mètres tous ces engins sont complémentaires et indispensables, c’est cette polyvalence qui donne l’espoir de rentrer avec une pêche qui permette encore de bouffer (manger pour les énarques).
Les textes sur plus de vingt pages que nous avons pris le temps de lire (alors que nos horaires sont loin d’être les mêmes que ceux des fonctionnaires) sont purement et simplement une nouvelle mise à mort des petits métiers.
En conclusion, la pêche artisanale nécessite le maintien de tous les filets dérivants pour sa survie. L’Atlantique n’a rien à voir avec la Méditerranée et pourtant tout le monde vote toujours contre nous. Même si la Méditerranée est contre une loi, peu importe son avis, elle ne sera jamais entendue du fait qu’elle n’a qu’une voix pour s’exprimer. »
Réponse d’ Alain Cadec, député européen, Président de la commission de la pêche du Parlement Européen : « Je vous remercie pour votre courriel concernant le dossier des filets maillant dérivant. Je comprends et je partage vos inquiétudes sur la proposition de la commission européenne demandant une interdiction totale des filets maillant dérivant.
Cette proposition ne respecte pas la réalité du terrain, elle met en danger la pêche estuarienne et certaines pratiques de pêche traditionnelle. La proposition n’est précédée d’aucune analyse d’impact fiable et ne respecte pas le principe de la régionalisation. Aujourd’hui, les filets maillant dérivant sont utilisés par le secteur de la pêche artisanale dans l’ensemble des eaux européennes.
En qualité de Président de la commission de la pêche, lors de la réunion de commission de la pêche du 22 janvier, j’ai demandé publiquement au Commissaire européen à l’environnement, aux affaires maritimes et à la pêche, Karmenu Vella, de retirer sa proposition d’interdiction que je considère comme une provocation.
Je suis d’avis que la législation actuelle sur l’utilisation des filets maillant dérivant permet une utilisation durable de ce type de filets en Europe. Les états membres sont responsables de l’application de cette législation et du contrôle de l’utilisation de ces engins.
Le Commissaire européen a décidé de ne pas retirer sa proposition, c’est pourquoi je demande le rejet du projet de rapport sur les filets maillant dérivant à travers un amendement de suppression.
Je reste à votre disposition pour toute question. »