Depuis de longues années, ce qui me réconcilie avec la vie, c’est la gentillesse, la générosité du coeur que je croise sur mon chemin, au hasard des rencontres. Ce qui est remarquable à Terra Madre, c’est cette générosité collective des bénévoles piémontais.
Dès l’arrivée au stade olympique de Turin, nos correspondants que nous retrouvons dans les bureaux d’accueil, organisés par pays ou par continent, nous confient badge et documents et nous donnent toutes les informations nécessaires. Nous n’avons plus qu’à nous acheminer vers le stade pour la cérémonie d’ouverture. Les participants arrivent tranquillement, isolément ou par grappes. Déjà , les délégations des différents pays se reconnaissent à leurs costumes traditionnels et à leurs drapeaux. Un grand orchestre composé de jeunes musiciens et accompagné de jeunes chanteurs jouera pour saluer les continents. Plusieurs indigènes parlent dans leur langue d’origine, Terra Madre d’emblée embrasse le monde, avec des idées simples, nouvelles et généreuses.
Cf. extraits des interventions in « Incroyable Terra Madre »
Tous les soirs, de nombreux cars – quatre-vingt m’a t-on dit – emmènent les convives par communauté de langue, dans les villes et villages avoisinants. Deux cars sont dédiés aux Français et Sénégalais hébergés à Fossane ou dans les villages alentours. A la descente des cars, nos famille d’accueil nous attendent.
Le premier soir, alors que nous avançons vers le château de Fossane, nous sommes reçus par la fanfare et un spectacle médiéval. Notre famille nous reçoit comme des princesses !
Le maître de maison parle bien français, les enfants s’y essaient. La grand-mère et la maîtresse de maison nous ont concocté une délicieux repas composé de charcuterie de la maison – la famille a un grand élevage de cochons en bio – et de spécialités de la région. Le deuxième soir, nous dinons avec d’autres participants et leurs familles d’accueil de la commune, servis par les jeunes du pays et ravis de chants piémontais de la chorale locale. Pourquoi diable n’ai-je pas appris le provençal ? Les enfants entendent les chants, apprennent leur langue régionale et préservent ainsi leurs racines. Le troisième soir, la réception est d’importance, elle regroupe toutes les familles d’accueil de Fossane et ses alentours, ainsi que leurs invités. La chorale est là , costumée. Le repas est délicieux et les conversations vont bon train entre membres de Slow Food France et du Sénégal, producteurs des différentes régions et nos amis piémontais qui préparent ces journées de longue date. Chaque soir, la grand-mère chez qui nous logeons attendra pour se coucher que nous soyons rentrés Elle sera la première levée, avec son joli sourire, pour nous servir le petit-déjeuner. Ces familles vont se mettre en quatre pour nous recevoir et faciliter notre séjour. Peu d’entre elles auront le temps et les moyens d’aller à Terra Madre. Nous repartirons le coeur plein et les bras chargés de cadeaux…
Sur place, nombreux sont les bénévoles qui ne verront de Terra Madre que la porte d’entré qu’ils surveillent, le vestiaire ou le stand qu’ils tiennent. Dans le hall, de l’eau minérale nous est offert à la demande, ainsi que du café après les repas. Peu de policiers ou alors bien cachés malgré la présence d’officiels. Le servie d’ordre est discret. L’ambiance est partout conviviale.
Au milieu du grand hall, un petit marché artisanal est tenu par des participants du monde entier. C’est l’occasion de découvrir de belles fabrications et d’échanger avec les uns et les autres.
Une dizaine de salles, équipées en traduction simultanée, abritent les différents ateliers. L’on peut passer de l’un à l’autre au gré des envies. Dans chaque atelier, la parole est donnée à ceux qui la souhaitent, libre à chacun de se présenter et de parler de son expérience. Des tribus qui se battent pour conserver leur langue, leurs terres, leurs cultures, leur liberté, aux habitants des pays industrialisés qui construisent leurs propres fermes et vendent localement des produits de qualité, comme ces américains du Maine qui, en quelques années, ont renversé la consommation locale des produits agricoles et d’élevage. Ils viennent de toutes les régions du monde, parlent dans leur langue, avec leur culture ; ils s’expriment simplement sur leur vie, sur leurs conditions, sur ce qu’ils tentent de mettre en place ; ils partagent déboires et réussites et ils se comprennent. C’est cela la grande surprise de Terra Madre ! J’avais en arrivant une vague idée de Slow-Food comme une organisation un peu bobo qui mêlerait gastronomie et bonne conscience. Lorsqu’un pêcheur d’une île du Panama m’a dit : « Je suis pour la philosophie Slow-Food« , j’ai eu conscience d’avoir raté une case.
Philosophie, le mot est juste. A aucun moment, l’on se sent instrumentalisé par des gens qui détiendraient la vérité ou qui voudraient poursuivre un objectif politique déterminé. Rares sont les polémiques. Pour tout le monde, la mondialisation et les conséquences inhumaines du jeu des multinationales sont des réalités. L’on ne s’en plaint pas, on recherche des solutions et et on échange sur les actions menées dans divers contextes.
Au sortir de ces quatre journées, l’on se prend à penser que les jours des multinationales sont comptés puisque partout émergent des consciences et des démarches innovantes.
Bientôt sur cet article, de nombreuses photos de Terra Madre 2010…