Une première plage a été fermée, vendredi 21 mai, en Louisiane, par la municipalité de Grand Isle, à 150 km au sud de la Nouvelle-Orléans. Un mois après le naufrage de la plate-forme Deepwater Horizon, l’inexorable est arrivé sur les côtes, sous la forme de langues gluantes d’un liquide couleur chocolat.
Selon les autorités, 80 km de plages, de bayous et de marécages sont maintenant pollués, alors que la fuite n’a toujours pas été colmatée et que l’entreprise BP a repoussé sa nouvelle tentative de sauvetage high-tech à mardi 25 mai au plus tôt.
Après le dôme de confinement, et le tube aspirant, la compagnie a promis d’essayer le « Top Kill » : une procédure qui verra l’injection de ciment pour sceller le puits. L’exercice est périlleux en raison de la profondeur (1 500 m) et de l’énorme pression nécessaire pour renverser le gaz.
Parallèlement, la colère a nettement monté à Washington contre l’attitude de la compagnie britannique et l’impuissance du gouvernement. Après dix jours de requêtes, BP a enfin transmis au Congrès les vidéos tournées 24 heures sur 24 par ses robots sous-marins. La commission de l’énergie de la Chambre des représentants a posté les images sur son site. Celui-ci a été pris d’assaut. Les spectateurs ont pu s’apercevoir que, malgré le « succès » du tube aspirant, de gros bouillons continuent à s’échapper au fond du Golfe.
Jeudi, BP a dà’ admettre que les chiffres que ses spécialistes avaient mentionnés – un écoulement de 5 000 barils par jour, soit 800 000 litres – étaient nettement sous-évalués. L’administration Obama a répondu en créant un groupe de travail chargé d’évaluer les quantités diffusées. Celui-ci ne comporte aucun membre de BP. Il devrait fournir une évaluation dans quelques jours.
TRANSPARENCE
La Maison Blanche a dà’ aussi écrire à BP pour demander plus de transparence : diffuser, par exemple, les relevés de pollution marine et atmosphérique. Le New York Times a montré, vendredi, que la compagnie faisait analyser les prélèvements effectués dans les municipalités par un laboratoire travaillant notamment pour l’industrie pétrolière, dont BP.
Un différend oppose également l’Agence pour la protection de l’environnement (EPA) au géant du pétrole sur la nature des produits dispersants utilisés en quantité astronomique (2,27 millions de litres) pour fragmenter la nappe et faciliter son évaporation. L’EPA a donné 24 heures à BP pour cesser de répandre du Corexit, produit nocif interdit il y a plus de dix ans en Angleterre, mais des stocks sont déjà arrivés en quantité en Louisiane, et BP a indiqué qu’elle allait continuer, faute d’une meilleure option pour l’instant.
Bousculé – un phénomène assez rare – par la presse, le porte-parole de la Maison Blanche, Robert Gibbs, a eu peine à convaincre que le gouvernement faisait « tout ce qui est humainement et technologiquement possible » pour arrêter l’écoulement. « Nous sommes confrontés à un désastre dont la magnitude n’a jamais été vue dans le golfe du Mexique », a-t-il justifié.
Barack Obama a, lui aussi, senti qu’il était nécessaire de s’expliquer. Plutôt qu’à la réforme financière, il a consacré son intervention hebdomadaire à la marée noire. Il a assuré que la réponse du gouvernement était à la hauteur, avec 24 000 personnes, plus de 1 000 bateaux et « les meilleurs esprits » du pays. Il a nommé les deux responsables de la commission d’enquête sur les forages pétroliers : Bob Graham, ancien sénateur de Floride, hostile aux forages, et William Reilly, un ancien administrateur de l’EPA et président émérite du WWF, le fonds mondial pour la nature.
Corine Lesnes