Associant les responsables et personnes fortement impliqués dans les convivium de Slow Food France, cette Université d’été avait pour thème : « Manger autrement pour promouvoir la biodiversité alimentaire et une nourriture bonne, propre et juste ‘. Un programme passionnant qui réunissait des acteurs divers et très mobilisés. De par la coopération entre le Collectif Pêche et Développement et Slow Food Provence, la pêche, les produits de la mer et le plancton ont eu leur place dans les débats. Que les consommateurs deviennent attentifs aux modes de production et à la façon dont ils s’intègrent dans les économies régionales est de bonne augure…
Une ambiance joyeuse à Millau pour ce festival écocitoyen « Les pieds sur terre ‘ avec pour thème « manger autrement ‘ et la défense du bien commun. Photo Midi Libre du 4 juillet 2019
Si la mer nous apparaît vaste, sans barrières et sans limites, le pêcheur artisan tient compte de la météo, des courants qui peuvent être plus ou moins favorables, du relief, de la végétation sous-marine et des mouvements saisonniers des espèces.
L’art du petit métier c’est la polyvalence : disposer des engins et des savoir-faire les plus appropriés pour prendre les espèces qui abordent ou se concentrent, au fur et à mesure des saisons, dans la bordure littorale ; cumuler les opportunités plutôt que d’investir et se spécialiser dans une technologie coà’teuse.
Les Prud’homies de pêche de Méditerranée française – une forme des gestion collective et territoriale héritée du Moyen-âge – ont favorisé, jusque dans les années soixante, cette forme de développement par une interdiction de techniques à grande capacité de capture et une répartition des droits d’usage. Cette dynamique était favorisée par la valorisation des apports sur les marchés locaux. Le productivisme initié par les pouvoirs publics a misé sur la compétitivité des unités les plus technologiques sur des marchés ouverts, et sur la liberté individuelle d’innover et d’investir compte tenu de ressources et de zones de pêche potentielles.
Avec la construction européenne et la raréfaction des ressources et zones de pêche, trois formes de développement sont discernables : le renforcement productiviste qui concentre les droits de pêche pour des armements de dimension internationale, la priorité donnée à un groupe d’acteurs comme de grandes ONG environnementales dont les principes généralistes, faciles à médiatiser (protection de certaines espèces, interdiction d’engins…), sont rarement compatibles avec les cohérences de terrain et les conditions de la pêche artisanale polyvalente, l’intégration des pêches dans des économies régionales multi-sectorielles et plus ou moins spécialisées au sein de l’UE.
Bien que balbutiante, la 3ème voie apparaît la plus avantageuse pour la collectivité. Ainsi, l’on peut voir comment la petite pêche varoise tente de s’adapter au développement touristique et résidentiel de son littoral en s’impliquant dans de multiples actions (aires marines protégées, gestion de zones de plongée, mise en place de mouillages écologiques, Pescatourisme, groupe FEP pour concilier les acteurs littoraux, marchés de vente directe, démarche qualité sur les savoir-faire, formation des jeunes…).
Un autre axe essentiel pour la gestion des mers et océans concerne le plancton qui est à la fois base de la chaîne alimentaire et producteur d’oxygène, outil de gestion littorale, objet de partenariat entre les secteurs, outil pédagogique et aliment très complet (spiruline, chlorelle, odontelle).
Quant à notre consommation, il ressort que nous mangeons essentiellement les poissons des pays du sud après avoir épuisé une bonne part des ressources de nos pêcheries : un choix qui n’est ni écologique (pollution et gaspillage protéinique des élevages industriels d’espèces carnivores, transports sur longue distance…), ni éthique (ces populations ont besoin de ces protéines), et qui met en danger nos pêcheries artisanales.
Pour construire l’avenir, refusons d’ores et déjà l’appropriation privative de la ressource et des zones marines préconisée par l’UE dans le cadre de la réforme de la PCP), favorisons les gestions collectives par les pêcheurs, redécouvrons les espèces locales de nos pêches artisanales, exigeons l’affichage sur la provenance et le mode d’exploitation des produits de la mer, et portons toute notre attention sur la diversité planctonique et les moyens de la conserver…
Intervention de Elisabeth TEMPIER, rédactrice de la revue et du site internet « L’encre de mer ‘, Philippe FAVRELIERE, rédacteur de Aquablog, regard sur la pêche et l’aquaculture, tous deux membres du Collectif Pêche et Développement, Lucien BIOLATTO, administrateur de Slow Food France
Le programme de cette université
L’article de Midi Libre :