Sur le quai de la gare de La Baule Escoublac, un groupe rassemblé d’Africains, sud-Américains, Asiatiques, ça y est, nous voilà rendues ! De rares têtes connues, on s’embrasse, on s’embarque dans de petits cars, les rencontres de Guérande commencent…
Premières prises de contact : Avram Fitiu, Roumain, parle bien français, il a fait ses études en Belgique, un stage en Bretagne ; retourné dans son pays, il enseigne l’agriculture, cultive des arbres fruitiers, il est aussi boulanger.
Le temps de s’installer dans de confortables bungalow d’un village vacance d’éducation populaire (Fédération des œuvres laïques), nous allons découvrir l’océan, vaste, paisible, caressant la longue plage arrondie qui s’étend au sud-ouest. Les senteurs des algues apportées par la marée, la lumière douce d’un ciel bleu souvent lavé par les pluies et les bourrasques, tamisé de quelques nuages, les vieilles maisons de granit… tout évoque la Bretagne, loin déjà d’un Paris étouffant. Nous rentrons en stop, la dame est charmante et contente d’échanger sur cet événement international qui anime pour l’heure son lieu de villégiature.
Nous retrouvons Avram qui nous plonge dans le tiraillement de son pays entre l’ultra-libéralisme des anciens communistes et le conservatisme des gens de droite, porteurs cependant des valeurs et de l’identité culturelles. Après la rupture de l’URSS, les propriétés d’Etat ont été récupérées par les anciens directeurs des unités d’Etat. « Les plus grands communistes de l’époque sont devenus les plus grands capitalistes. Ils prônent l’agriculture intensive sur des milliers d’hectares. 12.000 fermes détiennent 50% de la surface cultivée tandis que 3,7 millions de familles se partagent l’autre moitié« . La plaine roumaine est une large réserve céréalière qui a alimenté l’URSS. Les anciens ouvriers des kolkhozes ont récupéré quelques-uns de leurs terrains mais sans les moyens de production. Ils les exploitent sur les collines et dans les montagnes, les terres les moins fertiles. Leurs enfants, souvent, ont fui vers de nouveaux eldorados, en Espagne ou en Italie, pour revenir, 10 ou 15 ans après, construire leur maison, retrouver leurs familles. « C’est 3 millions de personnes de moins de 40 ans qui sont parties, la force vive de la nation ». Dans ces mouvements erratiques, le renouvellement de la population paysanne n’est pas assuré, loin s’en faut. « Il faudra plus de 50 ans à ce pays pour retrouver ses bases et se forger une identité« . C’est le seul pays qui avait remboursé sa dette extérieure avant la chute du mur, au prix de la souffrance du peuple. Les dettes des autres pays ont été annulées… la souffrance, comme toujours pourrait-on dire, n’a pas été voie de salut…
Petit discours d’introduction du représentant du village vacances, heureux d’accueillir tant de diversité ethnique. A notre table : un petit tour du monde, nous réunissons deux Chinoises, une Péruvienne des hautes montagnes, une Brésilienne et trois français. « Il nous manque l’Afrique » souligne la Brésilienne. « Non, dit Pascale, bien que blanche, je suis née à Dakar ! »
Visite, avant de se coucher, avec Diégo, dans la salle réservée aux journalistes. Il est prévu de mettre en ligne, au jour le jour, sur le site de Terre citoyenne des témoignages de ces rencontres…