Mari Mira à  Marseille, un village à  « l’esprit cabanon »

Mari Mira à  Marseille, un village à  « l’esprit cabanon »

L’artiste Guy-André Lagesse, pose devant l’oeuvre « La salle polypliante », le 17 septembre 2007, sur le port de Marseille

A Marseille, devant le port et ses grands bateaux blancs, pousse un village farfelu fait de bric et de broc : Mari Mira, une exposition installée jusqu’au 28 octobre sur « l’esprit cabanon ou l’art fait avec les restes du monde ».

Des poubelles deviennent fontaines ou balancelle, des pneus d’avion se découpent en gracieux cygnes noirs et des bouteilles de soda en bouquets chatoyants. Le village est semé d’aphorismes comme « la pêche est un combat sans merci avec la sieste ».

« Mari mira » –expression forgée à  partir de l’argot créole de l’Ile Maurice avec deux mots signifiant « énormément fantaisie » ou « terriblement excentrique »– s’élabore et grossit depuis douze ans au gré de voyages et rencontres artistiques.

De ses débuts en 1995 à  Port-Louis (Ile Maurice) jusqu’à  Marseille –où elle est déjà  venue en 1996– en passant par Paris, Durban et Johannesbourg en Afrique du Sud puis Suva dans les îles Fidji, 130.000 personnes l’ont déjà  visitée. La prochaine destination pourrait être Glasgow en Ecosse ou l’Inde.

Des « guides inspirés » –comédiens professionnels– emmènent avec bonne humeur les visiteurs explorer « la maison de réflexion » avec son lit transformable en armoire ou table et « la cuisine de plein air », ou jouer au « babyfoot » en bois flotté récupéré sur une plage avec fourchettes et couteaux en guise de joueurs.

Un « bateau lune de miel » a des tuyaux PVC pour flotteurs, une antenne parabolique transformable en toit et sur le pont un tapis en vieux journaux et emballages soigneusement scotchés. Un tapis réversible : le jour, deux cercles figurant l’homme et la femme sont séparés, la nuit ils sont rassemblés.

« Je trouve tout sur la décharge près de chez moi », explique Kishore Lal, artiste et peintre en bâtiment venu des Fidji participer au montage.

Il a aussi confectionné avec son ami Boogie, mort entre temps, une fontaine avec de gros coquillages. « Chez moi, les gens s’en servent de cendrier. Là , c’est pour que les oiseaux viennent boire et se baigner ».

Chaque installation est née de rencontres avec des artistes comme Kishore, explique Guy-André Lagesse. Lui-même plasticien, ce Mauricien né en Afrique du Sud et installé à  Marseille depuis une vingtaine d’années, a lancé l’aventure avec l’écrivain arlésien Jean-Paul Curnier, familier dans son enfance des cabanons de Beauduc en Camargue.

L’exposition se veut « un hommage à  toutes les inventions au quotidien », dit Guy-André Lagesse, « on veut partager le fait qu’on peut être créatif tous les jours, on peut faire de chaque instant de la vie quelque chose de formidable! ».

Mais « on n’a pas de message, on fait juste quelque chose qu’on veut partager », insiste-t-il. « L’idée, c’est de ne pas en avoir : les idées sont fatigantes, mieux vaut les laisser venir dans la rencontre ».

Il aime « la philosophie sur la berge » des pêcheurs rencontrés à  Paris au bord d’un canal –« ils résistent à  la production massive, ils ont une manière de faire attention aux petites choses »– ou des constructeurs de cabanons –« ils créent un état de bien-être avec peu de moyens, un sentiment de liberté avec trois fois rien ».

Il entend « s’inspirer de cette créativité populaire pour fabriquer un art à  part entière ». L’exposition, projet pilote de la candidature de Marseille Provence au titre de capitale culturelle européenne en 2013, est produite par l’association Les Pas perdus avec le centre national de création Lieux Publics.

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