Réforme des comités des pêches : quel lien entre l’Etat et la gestion locale de la pêche et des territoires ?

Monsieur le Ministre,

Nous étudions le projet de réforme des organisations professionnelles de la pêche et constatons que celui-ci ne prend pas en compte la situation méditerranéenne, soit 85% de petits métiers répartis sur plus de 2 000 km de côtes (Corse incluse) et représentés par 120 prud’hommes pêcheurs nouvellement élus et ce, par un système d’élection directe tout à  fait démocratique.

Notre littoral est fortement urbanisé et soumis à  de multiples activités, plus ou moins compatibles. La présence en tous les points du littoral de marins habitués à  la gestion des pêches et des territoires est un point fort de notre gestion littorale. La création d’aires marines protégées, dont certaines datent de plus de 20 ans, ne s’est faite qu’avec la participation des prud’homies de pêche. Et pour ne citer que quelques cas, la création du cantonnement du Cap Roux, la réhabilitation de l’Etang de Berre, la préservation des étangs palavasiens, la conciliation d’activités d’élevage ou de pêche dans les zones portuaires de Fos-Berre, la gestion de la pêche dans le Parc de Port-Cros et aux abords de l’àŽle du Levant, la création, la gestion et le suivi des réserves du Parc Marin de la Côte Bleue, le redressement du grau de la Vieille Nouvelle, la dépollution de l’Etang de Campignol ont été rendus possibles grâce à  l’institution prud’homale. Dans le contexte environnemental actuel, il est nécessaire de s’appuyer sur des professionnels de la mer, observateurs de longue date des écosystèmes littoraux et fortement ancrés dans les tissus économiques, politiques et sociaux de chaque commune.

Par ailleurs, avec les temps de crises que nous traversons, il est à  craindre une augmentation du braconnage, d’où la nécessité d’avoir des hommes de terrain structurés et organisés.

Enfin, du fait de notre expérience millénaire de la pêche nous avons su garder bon nombre de petits-métiers relativement sélectifs et dont l’intensité de capture est limitée. La répartition, dans le temps et dans l’espace, de la pression exercée sur chaque type d’espèces nous permet de mieux gérer notre ressource et nos territoires. Cette forme de gestion requiert une connaissance très fine des métiers et des usages, et c’est probablement pour cette raison que de tous temps elle a été confiée à  des prud’hommes pêcheurs. De plus, cette gestion s’apprécie dans sa globalité, une notion qui n’est pas facile à  faire passer quand la gestion des pêches actuelle, construite pour la pêche industrielle, se focalise sur des modèles bio-économiques. Il est donc essentiel que les prud’hommes participent directement à  la gestion des pêches aux différents niveaux.

Ainsi, nous vous demandons d’intégrer les Prud’hommes dans la réforme de l’organisation professionnelle de la pêche afin d’assurer une cohérence entre notre gestion au niveau local, et les décisions prises aux niveaux national et européen. Compte tenu du nombre et de la répartition géographique des Prud’homies, nous sommes prêts à  nous fédérer. De cette façon, nous pourrons également bénéficier des expériences des uns et des autres pour ces deux formes de gestion.

Accessoirement, nous voyons mal comment les gestionnaires commerciaux des apports des grands métiers (OP Méditerranéennes) pourraient décider des licences pour la pêche à  l’anguille (?), ou pourquoi il n’y a qu’une seule forme de répartition au sein des comités départementaux ou interdépartementaux sachant que les OP ne concernent que le Golfe du Lion

Dans l’attente de votre réponse, et avec nos cordiales salutations.

Collectif de Prud’homies dont celles de : Antibes, Bandol, Cannes, Carqueiranne, Giens, Gruissan, La Ciotat, La Seyne sur mer, Le Brusc, Martigues, Menton, Palavas, Saint-Raphaêl, Saint-Tropez, Salins d’Hyères, Sanary, Toulon

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