Dix communes de l’estuaire de la Loire réclament réparation du préjudice écologique. Elles proposent un barème en fonction, chacune, de la taille de l’estran.
Comment évaluer le dommage causé par la mort des 73 000 macareux, guillemots de Troïl et autres eiders à duvet, mazoutés par l’érika ? Au procès en appel qui se tient à Paris, l’avocat de la Ligue de protection des oiseaux (LPO), Me Kelidjian, a proposé, hier, une solution qui en vaut une autre.
Pour savoir combien de personnes au minimum dans le pays se sentent concernés par la mort de ces volatiles, il prend en compte une pétition de la LPO qui date de 1998 : elle avait obtenu 1,7 million de signatures. Puis, il s’appuie sur le don moyen des Français : 106 € par an, selon le Baromètre de la générosité (Fondation de France). Il ramène ce « ticket ‘ à 8,48 €, car seulement 8 % des donateurs soutiennent la cause animale ou environnementale. Puis, le multiplie par 1,7 million. Et voici la valeur, selon lui, du préjudice causé à la gent ailée par le naufrage de l’érika : 14 millions d’euros.
Compliqué ? C’est normal. On manque de références pour évaluer le vivant non commercial. Prenons le cas des dix communes de l’estuaire de la Loire qui réclament réparation pour atteinte à l’environnement. Leur avocat, Me Huglo, s’appuie sur un rapport remis récemment au président de la République, qui évalue à 970 € la valeur écologique d’un hectare de massif forestier, à 600 € celle d’un hectare de prairie.
Atteinte à l’image
Le rivage marin ? « 1 000 € l’hectare ‘, propose Me Huglo. Et de réclamer 400 000 € pour Batz-sur-Mer, La Bernerie-en-Retz, Saint-Brévin, Saint-Hilaire-de-Riez ; 300 000 € pour Mesquer, La Plaine-sur-Mer et Saint-Michel-Chef-Chef. 200 000 € pour Le Pouliguen, Préfailles et Pornic. Toutes sommes calculées, pour chacune, en fonction de la surface de son estran, c’est-à -dire la portion de rivage découvert par la marée.
C’est beaucoup, d’autant que ces indemnisations viendraient s’ajouter à celles demandées pour le dommage direct (13 millions d’euros au total) et pour le préjudice à l’image de marque, soit une note supplémentaire de 10 millions d’euros. « Quelle que soit l’indemnisation que vous accorderez, jamais vous n’approcherez la réalité du dommage subi ‘, a plaidé Me Huglo.
Une commune, toutefois, se distingue en faisant l’impasse sur le préjudice écologique : Le Croisic. Son avocat, Me Treille, a préféré mettre le paquet sur l’atteinte à l’image subie par le petit port qui fut, en 1999, l’épicentre de la marée noire. Pour l’évaluer, il a recours, lui aussi, à sa propre méthode de calcul : le nombre d’articles dans la presse et de reportages à la télévision. Il rappelle que Le Croisic a été, et de très loin, la commune la plus citée pendant la marée noire. Prix de cette contre-publicité : 1 million d’euros.