« Le poisson n’est pas un produit de masse mais un produit occasionnel qui doit rester festif ‘

Photo
Alliance Produits de la mer/SeaWeb

Un fort déclin de la biomasse

En 2001, les prévisions pour la pêche étaient fausses car les données fournies par la Chine étaient très largement surestimées. En corrigeant ces données, l’on peut voir un fort déclin de la biomasse en Europe, en Amérique du Nord et au Japon.

Une croissance expansionniste qui n’est pas durable

Avec l’industrialisation de la pêche, on prélève, de façon expansive, le capital constitué par les stocks de poissons, alors qu’auparavant on ne prélevait que les « intérêts ‘ fournis par le renouvellement de la ressource marine. Aujourd’hui, l’Espagne, par exemple, pêche partout. Ce sont les flottes de 3 à  4 pays qui couvrent la planète alors que d’autres grands pays du sud, comme le Brésil ou l’Inde, ne participent pas à  ce « vol ‘ international. C’est un schéma à  la Madoff qui est à  l’œuvre dans la filière. L’expansion se fait en surface (sur toutes les mers du globe) mais aussi en profondeur : on pêche aujourd’hui à  des profondeurs importantes. Egalement la variété d’espèces ciblées a augmenté. Les consommateurs n’ont pas remarqué la diminution des captures car l’approvisionnement des marchés des pays du nord se fait avec les produits pêchés sur toutes les mers du globe

Changements climatiques

Chaque poisson a sa répartition spatiale par rapport à  la température de l’eau. Si la température croît, les poissons se déplacent car ils ne peuvent réguler leur température. L’on observe un mouvement vers les pôles qui a démarré depuis 20 à  30 ans. Il en résulte des espèces invasives mais aussi des extinctions locales. Les projections montrent que les poissons seront plus abondants en Norvège, Groenland, Alaska et moins abondants partout ailleurs. Ces projections tiennent compte d’une série de paramètres(Profondeur, salinité, glaciers, estuaires, upwellings côtiers, production primaire,
récifs coralliens.)
mais ne prennent pas encore en compte l’oxygène, les algues (taille des cellules) et l’acidification des océans. S’il y a des couches chaudes en surface, il y a moins de poissons au fond car l’oxygène diminue. Bilan : tout le monde est perdant, et surtout les Tropiques.

« Pêche et conchyliculture en 2020 : une démarche environnementale à  l’échelle planétaire, une organisation économique et sociale à  l’échelle humaine ‘.
Panel présenté par Pierre Mollo (spécialiste plancton), Elisabeth Tempier (Collectif Pêche et Développement), Christian Décugis (Comité local des pêches du Var), Philippe Favrelière (Aquablog) et Benoît Guérin (CCR Sud Atlantique) – Photo Alliance Produits de la mer/SeaWeb

Aquaculture

La croissance de l’aquaculture vient principalement des 2/3 des apports herbivores qui seraient produits en Chine mais cette croissance manque de crédibilité car elle n’est pas corrélée avec celle des céréales dont elle dépend. Quant à  nos élevages carnivores (saumon, dorade, bar), la farine de poissons vient de la pêche, il s’agit de déshabiller Pierre pour habiller Paul.

Du point de vue de la sécurité alimentaire et de la santé

Ces produits ne peuvent nourrir le monde dont la population est croissante. Les grands marchés européens sont approvisionnés à  80% par des importations des pays en vois de développement. Nous avons d’autres sources protéiniques que ces pays. Notre consommation de poissons « bons pour la santé ‘ est liée à  une mode qui pourra passer aussi vite que celle des épinards (1950), de la vitamine C (1970), des fibres (1980), du cartilage de requin (1990) ou des micronutriments (2000).

Comment manger ? Comment faire des choix raisonnés ?

Avec une carte de crédit et des « guides ‘ sur les espèces à  privilégier pour ceux qui peuvent choisir ? C’est une agitation ou une perturbation horizontale. Souvent le vendeur ne sait même pas d’où vient le poisson. On devient moralisateur mais l’agitation verticale n’a pas lieu. Les Africains ont du mal à  trouver du poisson sur leurs marchés alors que nous avons, à  Rungis, les produits pêchés dans leurs eaux.

Les pêches artisanales

Elles ont une grande production avec peu d’énergie et plus d’emplois. La FAO, tout comme l’Europe, a sous-estimé les captures de ces pêcheries, elles ne sont pas petites. Elles peuvent exporter et sont plus durables que la pêche industrielle. L’essor mondial du chalutage est lié au bas prix du pétrole mais c’est fini car la marge de rentabilité dépend plus du prix du carburant que des prises en volume. Un tiers des captures est gaspillé en farine de poissons pour les saumons et les porcs. On ne « produit ‘ pas du poisson, on le transforme d’un produit en un autre. On peut très bien manger des anchois plutôt que de les transformer en farine. La mort des pêcheries industrielles est positive car elle permet aux pêcheries côtières de se redévelopper. Les grands et petits bateaux sont en concurrence sur les mêmes stocks, il faut donc réduire cette concurrence.

Carte commentée par Philippe Favrelière - rédacteur d'Aquablog : regard sur la pêche et l'aquaculture - lors du panel : « La pêche en 2020 '

En conclusion

Le changement climatique s’accroit, il faut reconstruire les populations côtières de pêcheurs, se pencher sur la renaissance des pêcheries artisanales locales et de leurs engins passifs. Ces pêcheries sont durables depuis des siècles. Nous mangerons « lentement ‘ des poissons, issus de stocks dont nous prendrons soin, plutôt que des poissons volés par des signataires d’accords corrompus.

Présentations et vidéos sur le site de l’Alliance Produits de la mer

Ce contenu a été publié dans Analyses. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.