Baudroie ou lotte : « C’est un poisson qui pêche à  la ligne… »

C’est un poisson qui pêche à  la ligne

Les Baudroies se tiennent sur les fonds meubles du plateau continental et se reproduisent entre septembre et mars. C’est la saison où on les capture plus facilement, par pleine lune ou lune descendante.

«On cale les “entremaoux ”([Trémails ou filets à  3 nappes superposées)] sur le matelas : sur la posidonie([Plante à  fleur qui constitue les herbiers)] . Après, elles s’alarguent et vont sur les pierres fouares([Les pierres au large)] . Là , tu cales tes sugetières (trémails à  langoustes) et tant tu prends une baudroie de 10, 12 ou 14 kg’.

Les mots de Clairin* : «Ca se prend aussi au palangre mais ce poisson, il bouge pas, il se met dans son trou, il pêche à  la ligne, il a une ligne sur la tête. Il se fait flotter ça devant et quand il y a un petit poisson qui vient voir ce que c’est, il le bouffe. C’est un poisson qui pêche à  la ligne ! Il peut bouger, il nage mais c’est un poisson balourd dans l’eau. C’est pas un poisson rapide. Il a un trait, il va sauter mais après c’est comme les rascasses, ça bouge pas trop dans l’eau. La baudroie ça m’est eu arrivé d’en prendre au palangre mais il faut que l’appât lui tombe devant, alors tant elle le prend. Et puis alors dès fois tu arrives pas à  la sortir. Tu fais péter.


* Clairin Deïnès, ancien pêcheur du Brusc

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Baudroie ou lotte

Baudroie grillée : La queue de baudroie est ouverte en deux dans sa longueur, macérée dans du citron et de l’huile d’olive, et grillée de chaque côté.

Baudroie pochée : Elle est plongée dans un court-bouillon d’eau salée. Arrêtez le feu dès que l’eau frémit sinon votre poisson perdra tout à  trac forme et saveur. Servez avec un filet d’huile d’olive ou une sauce.gribiche. Pour celle-ci, mélanger un oeuf dur (ou même mollet) écrasé avec une vinaigrette, quelques câtres, des cornichons en rondelles et du persil hâché.

Baudroie rôtie : Piquée d’ail, salée, poivrée et arrosée d’huile d’olive, la baudroie est rôtie au four.

Joues de baudroie : «On retire la peau et la joue apparaît. Après, avec l’opinel, on s’appuie sur un cartilage et on suit la cavité osseuse pour dégager la joue. Avec une grosse baudroie, on obtient des petits steaks sympathiques que l’on cuisine à  la poêle avec une persillade. on peut aussi les faire paner ou les faire revenir avec de l’oignon et une sauce tomate pour manger avec des pâtes
‘.

Pain de baudroie : Faites un coulis avec 1 oignon blanc et une gousse d’ail émincés revenus dans l’huile, ½ kg de tomates pelées et coupées, 2 poivrons rouges pelés, épépinés et coupés en dés. Cuisez le tout 20mn. Faîtes pocher 700 g de baudroie dans un court-bouillon d’eau salée, agrémenté si vous le désirez d’échalote, persil, thym, laurier, poivre. Retirez les filets de poisson. Battez 6 œufs avec du sel, du poivre, du curry et une branche de basilic et mélangez-les au coulis. Dans un moule à  cake beurré, alternez la moitié du coulis, les filets de poissons et l’autre moitié du coulis. Cuisez au four, au bain-marie, therm. 5/6 (150°C) environ ¾ d’heure. Servez froid avec une salade et de la mayonnaise.

Baudroie en brochettes([Recette de Sophie H. Marty)] : Coupez votre poisson en dés que vous enfilez sur des piques en alternant avec des morceaux de poivron cru de différentes couleurs, d’oignon cru, de petit-salé fumé et de tomates cerises. Les faire mariner une demi-heure dans un mélange : citron – huile d’olive – sel – poivres mélangés – marjolaine (origan). Les faire griller quelques minutes sur la braise ou sous la salamandre du four en les tournant.


Le foie de baudroie c’est le foie gras de la mer : dénervé et juste poêlé ou mi-cuit.

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L’embornier et le congre

Le congre, il se prend tout seul quand il veut

Prédateur vorace, le congre chasse de nuit poissons, crustacés et poulpes. C’est en venant dévorer une prise dans le filet qu’il se fait prendre quelquefois. Tournant alors sur lui-même et dans tous les sens pour se dégager il enroule les mailles. Démêler une torque([Torque ou touarque : toile entortillée autour d’une bouillie de chair mâchée et d’arrêtes)] de fiella relève parfois du cauchemar.

Le congre noir (Bec fin) vit dans les petits fonds rocheux, les enrochements des digues. Le congre blanc (Commun) affectionne les épaves, la vase et les éboulis rocheux des grands fonds jusqu’à  300m.

Au moment de la maturation sexuelle, entre 5 et 15 ans, le squelette se décalcifie, les dents tombent et ces adultes meurent après le frai. Celui-ci a lieu en été, en eau profonde, et la femelle pond entre 3 et 8 millions d’œufs.

Les larves, transparentes et pélagiques restent entre 100 et 200m de profondeur pendant 1 à  2 ans. Après leur métamorphose, elles gagnent les eaux côtières peu profondes.

Les congres se capturent, par sourd de lune([Nuits d’obscur car le congre craint la lumière et la lune)], à  la palangre armée d’un fil costaud et de gros hameçons, au trémail([Filet à  3 nappes superposées pour les poissons de fond. La battude est souvent trémaillée, elle se compose d’une nappel simple qui affleure et d’un trémail à  sa base)], à  la battude trémaillée ou encore dans une nasse : l’embornier.

L’embornier

Les mots de Clairin* : «On a le jambin ou l’embornier, une nasse exprès pour le congre, une nasse d’1m à  1m50 de long pour 50cm de diamètre. On esque ce panier avec du poulpe que l’on a fait un peu brusqué (brà’lé). Rien que l’odeur Le congre, il marche à  l’odeur. Tu le laisses toute la nuit avec du poulpe amarré entre 2 bâtons. Tu le mets de manière que le congre ne peut pas l’attraper ou s’il essaie, il rentre la queue. Car tant qu’il a un bout de queue dehors, il ressort, il fait marche arrière. Il y a un filet devant l’entrée, un filet qui fait bourse et qui s’écrase en venant dedans. Alors à  l’intérieur, il est très aplati. Le congre, il trouve pas la place pour pouvoir passer. Mais s’il y a laissé la queue, il fait marche arrière et il ressort. Et il rentre que s’il est obligé. Lui, il le sait qu’il a une queue mais quand il peut pas attraper l’esque, tant dès fois il se laisse aller et il rentre. La murène, c’est un peu comme ça aussi mais en principe les murènes sont un peu moins grosses, quoiqu’il y en a de belles. Et puis alors la murène, c’est combatif. On cale pour les congres mais le congre, il a peur de la murène. Si dans le panier, il rentre une petite murène, le congre il rentre plus. Ca fait que tu n’en prends jamais !

* Clairin Deïnès, ancien pêcheur du Brusc

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Congres : comment les distinguer ?

Conger conger (Famille des Congridés)*

Le congre commun a le dos gris plus ou moins foncé ; sa nageoire dorsale commence à  l’extrémité de la nageoire pectorale et ses yeux sont assez petits. (Taille max : 3 m Prof. : 0-300m)

Le congre bec fin (Gnatophis mystax) a le dos brunâtre et la queue noirâtre ; sa nageoire dorsale commence à  mi-longueur de la nageoire pectorale et ses yeux sont assez grands. (Taille max : 60cm)

Le congre des Baléares(Ariosoma balearicum) est gris-brun plus ou moins doré ; sa nageoire dorsale commence à  la base des pectorales et ses yeux sont grands et rapprochés. (Taille max : 50 cm)

L’anguilles (Anguilla anguilla), à  l’inverse des congres, a la mâchoire inférieure saillante. La nageoire dorsale commence loin de la nageoire pectorale et le dos est noirâtre. (Taille max : 1,5m)

* Cf. Patrick Louisy – Guide d’identification des poissons marins – Europe et Méditerranée – Editions Ulmer 2002

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Battude trémaillée et oblade

C’est un poisson qui ressemble au sar et qui a ses titres de noblesse

L’oblade vit en bancs, toujours en mouvement entre le fond et la surface selon l’heure et la saison. Elle fréquente les fonds rocheux, les herbiers littoraux et s’alargue([ Prendre le large)] en hiver. Très vorace, elle mange des algues, des invertébrés et des larves, elle chasse fréquemment à  l’aube ou au crépuscule.

Anciennement, on la pêchait à  la canne, en matinée et dans l’écume, après l’avoir attirée en “broumégeant” c’est à  dire en jetant une pâte odorante (broumé) à  la mer. On la piège aux battudes toute l’année et surtout au printemps lors du frai, à  l’automne et les nuits de demi-lune. Quand elle nage, elle se prend parfois dans un trémail([Filet de 3 nappes superposées, calé au fond de l’eau)] à  grandes mailles.

La battude trémaillée

Ce filet a dans sa partie supérieure une nappe simple et à  sa base un trémail constitué de 3 nappes superposées. Comme il joint le fond à  la surface, sa hauteur (10/40m) dépend des zones travaillées. D’une longueur de 200 à  300m environ, il est calé en forme de point d’interrogation pour dérouter les poissons et les pousser à  s’emmailler. Le pêcheur recherche des fonds d’herbiers où il ne dérive pas et ne s’accroche pas mais aussi des zones où les poissons ont leur façon de passer. Habituellement, il est mis à  l’eau pour la nuit.

Les mots de Clairin* : «Le poisson quand il frappe dans un filet qui fait mur, il a tendance à  descendre. Même s’il ne se prend pas dans la maille de la nappe parce qu’il est trop gros ou qu’il cherche à  s’échapper, il descend “s’embourser” dans le trémail. En bas la baille est la même qu’en haut alors il ne pourrait pas se prendre s’il ne rentre pas la tête dans la maille. Mais s’il continue à  pousser, il va passer le filet dans les grandes mailles qui peuvent faire 20, même 40 cm de côté. Alors en poussant là -dedans, il fait une bourse et il s’enferme dans cette bourse puis il se met à  tourner, puis il la tord et il ferme la bourse. Des fois, il crève le filet et il s’en va. Des fois, il reste.’

* Clairin Deïnès, ancien pêcheur du Brusc

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Langoustines

Dans un grand faitout  » genre marmite à  pot au feu  » je mets un fond d’eau chaude du robinet (4 à  5 cm) et 2 poignées de gros sel. Je verse 3 à  4 kg de langoustines bien fraîches  » les vraies, celles pêchées du jour par les côtiers – et je rajoute un peu de gros sel. Je fais chauffer et au bout de 3 minutes, l’eau remonte bien car les langoustines rendent de l’eau. Je passe et je sers avec de la mayonnaise. Pour moi l’essentiel, c’est de ne jamais les recouvrir d’eau pour la cuisson. C’est l’eau qui remonte et qui les cuit pratiquement à  la vapeur. Quand elles sont bien fraîches, je mets rien de plus sinon ça donne un goà’t qui n’est plus celui de la langoustine.

Quand elles sont glacées, qu’elles viennent des hauturiers de la Mer Celtique, elles ont tendance à  devenir molles. Je rajoute une giclée de vinaigre dans l’eau, ça les affermit et ça change pas le goà’t. Et je laisse même pas 2 mn à  la cuisson. Celles-là , on peut les cuisiner en sauce.

Les galathées, y en a de moins en moins. Elles se conservent moins bien, elles noircissent plus facilement. Pour la cuisson, c’est le même principe mais, là , l’eau ne remonte pas à  la surface. Il ne faut pas laisser plus de 3 minutes non plus. Le goà’t est un peu plus sucré, je les préfère aux langoustines même s’il y a peu à  manger.

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Gestion collective : la langoustine du Golfe de Gascogne – les Prud’homies méditerranéennes de pêcheurs

Conscience d’un territoire : l’Eldorado a des limites

« Quand le jardin est petit, il vaut mieux s’organiser ‘
« Mieux vaut faire un petit baquet tous les jours qu’un gros et plus rien après ‘

Avec la modernisation des flottilles, l’Atlantique découvre ce que la Méditerranée sait depuis plus de 1000 ans, de par l’étroitesse de son plateau continental et le faible niveau d’abondance des ressources marines qui en découle.

Avant on disait : « Quand y aura plus à  pêcher ici, on ira là  ‘. Aujourd’hui, y a plus un centimètre carré de non exploité, c’est un champs qu’on doit gérer et cultiver. Depuis 10 ans, on a conscience qu’on a fait le tour… La ressource naturelle, on doit la gérer collectivement et intelligemment surtout.

Retour sur la communauté de pêcheurs, son identité artisanale :

Sur la langoustine du Golfe, on n’a pas trop de concurrence, on peut s’entendre entre nous. Sur les autres espèces, il faut gérer avec les flottilles espagnoles, écossaises, hollandaises… Mais il faut réserver les 200 milles nautiques aux artisans. Il y a, à  20 milles de nos côtes, des 80-100m de long qui pêchent en un jour ce que les artisans ne pêchent même pas en une année

Tous les pêcheurs d’une zone adhèrent obligatoirement à  la prud’homie qui gère le territoire. Il nous faut une certaine égalité des chances dans ce petit jardin.

Des règles collectives pour accorder les hommes et la nature :

* Accès aux ressources : gestion par métier (licences) ou de territoire (droits d’usage)

Avec les licences, toutes les techniques sont bien encadrées, avec des mesures précises. Plus de 3000 licences organisent la pêche en Bretagne et 250 permis de pêche spéciaux (PPS) structurent la pêche de la langoustine sur les vasières du Golfe entre Penmarch et Oléron (bateau ≤ 20m, langoustine ≥ 9 cm, interdiction des 3 funes en Bretagne).

La licence, peut-être en Atlantique ça marche mais l’Atlantique est vaste et a des marées, les pêcheurs peuvent se spécialiser dans des métiers et des ressources spécifiques. Montagnes sous-marines ou lagunes, et biodiversité : en Méditerranée, les petits métiers côtiers polyvalents doivent pouvoir exercer plusieurs techniques dans la même journée, changer d’un jour à  l’autre, s’adapter en fonction des saisons, de la météo. Les opportunités ne sont pas si grandes. Chaque métier est réglementé techniquement et par des droits d’usage limités dans le temps et dans l’espace. S’il y a concurrence sur un espace ou une ressource, la prud’homie attribue des postes de pêche par tirage au sort. Quand c’est possible, un tour de rôle répartit les chances… Certains métiers (pêche à  pied des palourdes, petite drague) ou certaines zones abritées, on se les garde pour les jours d’intempéries. C’est la poire pour la soif.

* Préserver le renouvellement : répartir la pression dans le temps et
dans l’espace, protéger les juvéniles et certaines frayères

Les Organisations de Producteurs gèrent maintenant les rythmes de capture afin de ne pas dépasser des quotas globaux annuels. « Trier au fond plutôt que sur le pont ‘ : un panneau de maille carrée fixé sur le chalut laisse échapper 40% à  50% de petits merluchons qui fréquentent les vasières : une innovation élaborée, testée et imposée par la profession en réponse à  une proposition européenne (suicidaire pour la pêche à  la langoustine) d’élargir à  100 mm la maille des culs de chaluts. L’échappement des petites langoustines, à  l’aide d’une grille, est en cours de perfectionnement.

La multiplicité des engins et des techniques sélectives et leur permutation « laissent reposer les fonds et les espèces alternativement ‘. Les tailles minimales des mailles et des hameçons comme la protection des moutons (arrêt de la pêche sur certaines frayères) complètent le dispositif.

* Veille sur les innovations technologiques et les conditions de rentabilité

Notre objectif est d’installer des jeunes sur des bateaux dits génériques L’idée est qu’on les fasse en série, qu’ils ne coà’tent pas trop cher (puissance limitée, peu de consommation de gas-oil) pour que le nouveau propriétaire ne soit pas incité à  développer un effort trop important sur la ressource pour rentabiliser des prêts et couvrir ses coà’ts.

Par la règlementation, on fixe les bases de la compétition entre les pêcheurs. Les prud’hommes surveillent les changements techniques et prennent des mesures de précaution : « Ce métier-là , on se l’est interdit ‘. Sinon, c’est un peu comme si pour travailler un même jardin, certains avaient un tracteur et d’autres une pelle.

Projet atlantique de labellisation, démarche-qualité varoise, ces produits se doivent d’être valorisés en tant qu’issus de terroirs spécifiques et de pratiques de capture respectueuses des hommes et de l’environnement.

L’accès au métier de pêcheur

* La transmission d’une culture, d’un art de vivre plutôt qu’un barrage à  l’entrée, scolaire ou financier

Aux jeunes, il faut leur transmettre le sens et le goà’t du métier, la culture qui va avec ; ça s’apprend surtout en mer Avec la formation actuelle, ils vont faire que des capitaines au long cours ! C’est un gros problème pour l’avenir La formation doit être adaptée à  nos petits métiers.

Certains aujourd’hui seraient prêts à  acheter des jours de mer. L’argent prend alors le dessus, c’est à  celui qui peut investir, on rentre dans une spirale On n’est pas là  pour faire de l’argent sur la ressource, il faut pas qu’on devienne esclave de notre métier.

* Des partenaires à  la gestion

Les détenteurs de bateaux génériques signent une charte de bonne gestion dans laquelle ils s’engagent à  respecter les règlements mis en place par la Commission langoustine et à  participer à  la mise au point des nouveaux dispositifs.

Nous cherchons constamment à  préserver la qualité de nos territoires littoraux et effectuons, de fait, un travail de veille écologique.

Un statut de « laboratoire ‘ pour construire l’avenir

C’est une pêcherie expérimentale, un banc d’essai avant la Mer Celtique ! C’est sà’r que l’on n’aurait pas fait tout ça, on aurait déjà  des quotas individuels transférables, une façon de transférer peu à  peu la capture d’une ressource commune aux grands armements industriels

Rares sont les expériences de gestion collective encore à  l’œuvre. La nôtre a fait ses preuves mais notre avenir passe par la reconnaissance de notre mode de gestion territorial au lieu d’une gestion par métier. Concrètement il s’agit de valider nos principes prud’homaux et leurs applications locales, en lieu et place de mesures européennes généralistes qui condamnent nos métiers (thonaille, gangui, battude trémaillée..), et d’un permis national pour la puissance des moteurs (PME) destiné à  réduire les pêcheries pléthoriques alors que le renouvellement de notre profession est menacé. En bref, que l’on nous accorde un statut de « laboratoire ‘, ce que nous sommes.

Un engagement professionnel à  soutenir

Le secteur des ressources humaines dédiées à  la bonne gestion du golfe est insuffisant. Les bonnes volontés sont réparties le long des 400, 500 km de côtes, c’est jamais facile à  manager Il y a des intérêts contradictoires, ça hurle de partout, on arrive à  trouver des solutions après des heures de réunion mais nous ne sommes pas assez nombreux.

Fortes de leur culture héritée, les prud’homies sortent de 40 années de résistance face à  une politique productiviste : l’institution a été désavouée par sa tutelle étatique et doublée d’un système de représentation peu adapté aux petits métiers de Méditerranée (secteur sans tradition syndicale, identité fondée sur les communautés artisanales de pêcheurs). Seule l’articulation de ces deux systèmes, demandée par les prud’homies, permettra une représentation effective de la gestion prud’homale aux niveaux étatique et européen

Soutenir l’embellie était plus facile que de gérer la pénurie.
Le travail des organisations professionnelles est stressant aujourd’hui.
Renverser la colère en créativité est épuisant parfois.

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Chalutier-langoustinier et langoustines

Cinq heures trente du matin, dans le village endormi palpitent les eaux du port. Le long des quais s’éclairent les petits chalutiers. Arrivés les premiers, après quelques enjambées de lisses des navires accouplés, les deux matelots montent à  bord, allument le moteur. Un bref salut au patron qui s’installe, largage des amarres et nos deux hommes s’engouffrent au fond de leurs couchettes. Chambrée lambrissée au creux de cette coque d’acier – réminiscence des traditionnels lits bretons derrière leurs portes fermées – certains ont installé un petit rideau devant leur couche ajustée. Lecture allongée, fin de nuit recouvrée, ils s’en remettent à  l’homme là -haut qui perce la nuit sous les feux du chenal, trace sa route à  force d’écran radar et GPS.

L’aube pointe sous la grisaille, les fonds attendus approchent – coup de klaxon – à  peine enclenchée la mise à  l’eau des panneaux, l’équipage est paré, botté, ganté, cuirassé, ceinturé d’un couteau, d’une aumônière de navettes à  ramender les chaluts. L’attaque commence, dans un cliquetis de chaînes et le tournoiement des deux enrouleurs – énormes – au-dessus de leurs têtes, nos marins, de leurs gestes précis, rapides, valsent malgré le tangage : arrimer le filet, assurer le bon déroulement des manoeuvres lancé par le jeu des manettes, là -haut sur la passerelle.

Entrecoupé de brefs cris pour lancer et stopper les machines, l’on croirait à  un ballet de trapézistes englués sur leurs ponts mouvants et glissants. L’eau glacée gicle à  leurs pieds tandis que les forces mécaniques décuplées les frôlent à  tout moment. Une forte vague et les voilà  trempés ! Qu’importe, les funes sont à  l’eau. Sus au casse-croà’te dans le carré – minime – la chaleur des cigarettes, l’odeur du café et les exploits olympiques des sportifs, les vrais, ceux de la télé !

Deux heures de pause avant la mise à  bord : le « virage de la pochée ‘. Drôle d’amas d’anneaux, lièges, cordages et fanfreluches, savant ajustement de filets et de mailles, mêlé de grilles plastiques et autres dispositifs : l’échappatoire des petites langoustines, le sas de sortie des merlus immatures. En bon ordre, tout cela devra reprendre sa place, sagement, autour de ces grandes roues avant de découvrir, d’un coup de ganse dénouée – enfin à  « l’ouverture des lignières qui scellent le cul du chalut ‘ – la pêche du trait et la promesse du gain. Jet puissant qui se déverse tout soudain, glisse, s’étale, frétille, s’échappe…
Le temps de saisir les caisses percées et nos hommes à  genoux plongent des deux bras dans cette étrange faune luisante. A une vitesse vertigineuse, les mains fouissent, saisissent et trient deux tailles de langoustines, lottes, merlus, lieux jaunes, soles et cardines, tous de belle prestance. Rapidement les congres – féroces – sont écartés.

Leurs rangées de dents, telles des limes tournoient jusqu’a scier leurs proies. Sous la pression du jet, crabes et tourteaux retrouvent, par le dalot ouvert, le goà’t du large suivis des mal-aimés de nos palais ignares : les savoureux chinchards, les valeureux maquereaux et les modestes congres dont les tranches grillées raviraient même les plus gourmets. Pas le temps de s’apitoyer sur nos bouderies citadines – se souvient-on que jusqu’à  mi-vingtième la lotte était bien méprisée et la langoustine peu choyée ? – D’une lame aiguisée remontant du ventre aux branchies, des mains expertes retirent les viscères, rincent et engrangent le butin sous le pont.

Tour de manège toutes les deux, trois heures jusqu’à  la débarq’ en criée, en fin d’après-midi. Relais des bras tendus sur le quai : passation de l’or rose, la « demoiselle bigoudène et sa cour d’argent ‘. La journée est finie, demain elle démarre à  quat’…

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Droits de pêche : Attention ! Une petite décision peut cacher un grand bouleversement

Payer pour pêcher : un transfert du droit de pêche vers l’industrie

Introduire la monétarisation de droits de pêche individuels ne constitue aucune garantie de « bonne gestion de la ressource et de l’environnement ‘ par une flottille industrielle (dé-territorialisée), juste une modification dans les calculs de rentabilité du fait de ce surcoà’t . Par contre, l’armement industriel a une plus grande capacité financière pour intégrer ce surcoà’t et capitaliser des droits de pêche. Dans un contexte de raréfaction des ressources et des zones de pêche disponibles, cette mesure a donc pour effet de concentrer les droits de pêche dans les mains des armateurs industriels au détriment des pêcheurs artisans.

Une gestion collective, au cas par cas, plutôt qu’une allocation nationale

En pratique, les exploitants des grands métiers, moins « adaptables ‘ que ceux des petits métiers, cherchent à  gérer leur activité avec une certaine « visibilité ‘, d’où l’idée de répartir, annuellement ou saisonnièrement, des quotas de façon individuelle. Cette mesure de répartition, prise collectivement et ajustée périodiquement au sein d’une Organisation de Producteurs, a un autre sens que l’institution nationale de quotas individuels qui, comme les Permis de Mise en Exploitation (PME) individuels, accordés pour la puissance des moteurs et le tonnage des bateaux, glisseront, dans un contexte de rareté, vers un marchandage de ces droits et une concentration du secteur.

Une position collective à  soutenir

Cette prise de position collective n’est pas facile dans une situation où les lobbies industriels sont forts et où les nombreux professionnels qui arrivent en fin de carrière voient d’un bon œil le fait de profiter gracieusement d’un droit qu’ils monnaieront avec la cession de leur navire. Cette redistribution, par les pouvoirs publics, d’un bien commun au profit de l’industrie, et avec des conséquences dommageables pour la ressource et l’environnement maritimes doit faire l’objet d’un large débat public dans la mesure où elle nous concerne tous, en tant que citoyen et contribuable.

Débat à  la prud’homie autour du paiement d’un droit de pêche à  une société de pêche en rivière pour permettre aux professionnels d’y travailler : instinctivement les pêcheurs perçoivent que cette décision transformerait radicalement leurs droits d’usage :

– « Ce serait bien la première fois qu’on paierait pour pêcher !
– Nous qui y travaillons régulièrement, nous pouvons reverser une part de nos revenus
– Ceux qui vont payer vont se croire propriétaires, les autres ne pourront plus y aller.
– Faut bien voir qu’à  cet endroit on peut pas être plus de 2 ou 3, ou alors on videra la zone.
– Oui mais ce n’est pas nominatif. On doit pouvoir y aller si on en a besoin et c’est à  la prud’homie à  organiser les postes.
– La prud’homie pourrait participer au ré-alevinage au nom de la communauté plutôt que de s’engager dans des droits de pêche individuels, et cela rentrerait dans le cadre de notre gestion environnementale ‘

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Partage de compétences et de dynamiques : « De la tontine à  la banque »

« Les banquiers considéraient que le milieu de la pêche était trop pauvre avec trop de risques. Les expériences précédentes ont fini par des clashs. Si le ratio de contentieux est trop important, le banquier se retire et c’est foutu pour 10 ans. Notre rôle a été de créer une relation de confiance entre le client et le banquier. Aujourd’hui, la preuve est faite que ces femmes peuvent emprunter, rembourser et même thésauriser.

C’est une politique des petits pas nécessaires. Si on brutalise quelqu’un, la porte se ferme de suite. Y a toute une culture à  propos de l’argent prêté pour faire marcher les petites entreprises. Si la femme achète les chaussures des enfants avec l’argent du prêt, ça ne va pas. L’entreprise qui confond le porte-monnaie et le tiroir caisse se casse la gueule.

Pourquoi 20 femmes ? Parce que j’avais des sous pour garantir 20, c’est tout. C’est une anomalie flagrante que ce soit nous qui garantissions. On n’a pas à  faire le boulot du banquier, prendre les risques sans les bénéfices. On peut aider, ouvrir les portes par nos relations dans la pêche

Le contrat était parfaitement cadré. Il faut voir que le banquier ne dérape pas et il faut expliquer aux femmes qu’elles doivent respecter strictement le contrat. L’objectif pour nous est de nous retirer quand on a réussi à  créer un lien entre le banquier et les femmes sénégalaises. C’est une affaire à  sénégaliser ‘

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