A propos des règlements prud’homaux de St-Raphaêl

Un fonctionnement souple et adaptable qui « colle au terrain » : les règlements prud’homaux peuvent être modifiés ou complétés, quasiment en instantanée, sur décision du Conseil des Prud’hommes, ou de l’assemblée générale de la Prud’homie. Cette souplesse réglementaire permet de régler rapidement les sources de conflit.

Des règlements peu généralisables : fruit de l’histoire et des conditions environnementales, cette Prud’homie « colle » avec la réglementation européenne actuelle qui « tombe » d’en-haut : peu de pêcheurs à  la thonaille à  reconvertir, pas de petits engins traînants à  justifier et organiser en plan de gestion, des tailles de mailles et d’hameçons qui correspondent. Par ailleurs, les caractéristiques de cette Prud’homie ne sont pas directement transposables : une flottille homogène avec l’absence de « grands métiers », un littoral relativement étendu par rapport à  la communauté de pêcheurs qui a permis de « geler » une zone en cantonnement de pêche et de limiter par là -même la pression de la pêche récréative, une côte un peu moins ventée que dans d’autres prud’homies exposées au mistral, un marché local constant…

Un modèle relativement fragile : tant que la réglementation se fait par le haut, il est difficile de prévoir les prochaines mesures européennes et nationales Déjà , la pratique du chalutage qui peut se faire à  1,5 milles des côtes lorsque le plateau continental est étroit (mesures techniques européennes en Méditerranée 2006) expose les fonds de la prud’homie à  des incursions intempestives. La Prud’homie a interdit le chalutage sur son territoire mais quels moyens de contrôle sont mis en place pour surveiller ce territoire spécifique ? Si des droits de pêche devaient être conférés à  de grands armements ou des techniques intensives, la question se poserait à  nouveau pour ce type de flottille dont l’impact environnemental pourrait être fort préjudiciable à  un petit « jardin » cultivé depuis des siècles par les communautés de pêcheurs artisans.

Une forte intégration au territoire communal, départemental, régional Le petit port de pêche et le marché local situés en plein cœur de la vieille ville de Saint-Raphaêl contribuent à  l’animation portuaire tout en donnant un ancrage culturel au site. La Prud’homie tente de préserver le renouvellement des ressources et de maintenir les conditions d’exercice dans la bande littorale malgré l’explosion des activités nautiques (25000 bateaux de plaisance dans le Var et 250 pêcheurs professionnels), de la pêche récréative et de la plongée. Ce faisant, elle contribue fortement à  la valorisation littorale (création d’un cantonnement de pêche interdit à  toute pêche professionnelle et récréative, participation aux sites Natura 2000…) et à  la conciliation des usages (commissions nautiques portuaires…).

Une gestion régionale des pêches, cohérente avec une spécialisation orientée vers des fonctions touristiques et résidentielles, se fera avec les communautés de pêcheurs, au cas par cas, et non en vertu de pourcentages globaux et de mesures généralistes.

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Quelle leçon tirer de 50 ans de productivisme ? Un système expansionniste qui peut devenir coà’teux pour la collectivité…


Ressources et zones marines sont dévolues par l’Etat aux unités de pêche les plus modernes pour être compétitives sur un marché élargi. Aux composantes locales précédentes s’ajoutent des composantes potentielles : ouverture du Marché Commun de la conserve, stocks potentiels (sardines, anchois, thons, merlus), zones potentielles du large repérées par des organismes de recherche, arrivée des pêcheurs rapatriés, sources de financement liées aux plans de relance

Cette logique productiviste est fondée sur une forte intervention étatique : suppression des limites réglementaires prud’homales, recherche technologique et de prospection maritime, organisation de circuits de distribution et de commercialisation pour des produits fortement périssables (criées, halles à  marée, machines à  glace, conserveries), aména-gements portuaires et organisation de circuits d’avitaillement, incitation financière à  la modernisation et l’inno-vation technologiques et à  la spécialisation pour des techniques intensives

Cette compétition technologique conduit à  une segmentation de la flottille, entre une flotte à  forte capacité de capture et des petits métiers de moins en moins nombreux qui tendent à  se spécialiser vers des techniques artisanales intensives, ou à  se reporter sur les espèces à  haute valeur marchande sur les marchés locaux

Gouvernance : Fondée sur la liberté individuelle d’innover et investir , cette forme d’administration s’oppose au maintien des communautés de pêcheurs. Les Prud’homies sont désavouées par leur administration de tutelle qui investit dans d’autres structures professionnelles (comités des pêches, organisations de producteurs). Les prud’homies persistent dans l’organisation de l’activité là  où les petits métiers sont en compétition pour les zones de pêche (étangs, bordure littorale), elles tentent parfois de concilier petits et grands métiers et de préserver les territoires de pêche en but à  l’industrialisation, l’urbanisation, l’essor du tourisme et les activités de loisirs.

C’est un mode d’administration expansionniste qui permet d’accroître fortement les quantités débarquées et d’étendre la filière et les emplois induits, tant que le renouvellement de la ressource, et des zones de pêche se prête à  ce rythme d’exploitation et que les marchés absorbent les apports. Dans le cas contraire, il peut devenir coà’teux à  la collectivité de réguler et contrôler :
– l’effort de pêche (financer la casse d’anciens bateaux et la construction de plus modernes, limiter l’effort de pêche et les débarquements),
– l’accès aux zones de pêche (accords de pêche),
– les apports et ventes au jour le jour (prix de retrait),
– l’impact sur l’environnement

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Ce que la Prud’homie de pêcheurs nous apprend : le productivisme est un choix de développement parmi d’autres

A mémoire d’homme, la gestion des pêches méditerranéennes fonctionnait selon une «logique de répartition’. Petit retour en arrière pour mieux comprendre notre développement actuel.

Jusqu’en 1960, zones et ressources marines de cette façade sont dédiées aux Prud’homies pour permettre aux communautés de pêcheurs de vivre de leur activité. Celle-ci est surtout de dimension locale : les communautés de pêcheurs artisans exploitent, à  proximité, les concentrations littorales des différentes espèces qu’elles valorisent par des circuits courts sur des marchés locaux, parfois avec le soutien financier de mareyeurs.

Cette logique de répartition organise les bases de la compétitivité en interdisant ou contraignant les techniques à  grande capacité de capture, et en alignant l’ensemble des métiers sur ceux à  faible capacité de capture, de manière à  ce que chacun puisse vivre de son activité.

Cette dynamique collective de répartition technique, spatiale et temporelle des droits d’usage conduit à  une homogénéité des outils de production et incite à  la polyvalence des pêcheurs qui s’investissent dans diverses techniques et savoir-faire associés.

La gouvernance reste prud’homale , l’Etat jouant un rôle de tutelle par l’intermédiaire des administrateurs locaux. Les règlements sont décidés en assemblée générale, ou par le conseil des prud’hommes, en vertu de
principes communautaires fondés sur le respect de la personne et des générations futures (protection de la ressource et des territoires) : « Tout le monde doit pouvoir vivre de son métier (ou le soleil se lève pour tout le monde). Il faut éviter qu’un métier n’en chasse un autre. Un métier, il vaut mieux le réglementer que l’interdire par rapport à  ceux qui en vivent. Il faut laisser reposer les espèces, ou les « pierres ‘ alternativement. La mer, il ne s’agit pas de la vider mais d’en bien vivre et d’en laisser à  ses enfants ‘

C’est un mode d’administration territorialisé, simple, efficace, démocratique qui a permis à  des communautés importantes de pêcheurs de vivre de la pêche littorale, et à  plusieurs vagues d’immigration de s’intégrer dans la profession, tout en préservant les territoires et la ressource ; soit un développement « durable ‘ selon le terme consacré.

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Recettes de sabre

Photo Sophie Hourdin-Marty

Aiguillettes de sabre panées

:

Je coupe le sabre en tronçons
de 6 cm de long environ. Avec la pointe du couteau, je fends le
tronçon dans sa longueur, en coupant le long de l’arête, et je
sors 4 bâtonnets de chair, de la taille d’un doigt. La peau du
poisson s’enlève facilement. Les morceaux sont roulés dans la
farine, trempés dans un oeuf battu avec du sel et du poivre, et
enduits de panure avant d’être jetés quelques minutes dans
l’huile bouillante. Déposées sur du papier absorbant, ces
« aiguillettes ‘ sont servies chaudes avec une rondelle de
citron. Coupés de cette façon, on peut aussi cuire les
morceaux dans une pâte à  beignets

Je pêche les sabres assez régulièrement au palangre dans des
fonds de 300 à  400 m. C’est un plateau où ils se rassemblent et se
mélangent quelquefois avec des dorades roses. Pour les sabres,
il faut un fil assez gros car leurs dents coupent comme un rasoir.
Pour les dorades roses, il faut caler « plus finement ‘ (avec du fil
plus fin). Pourquoi ? C’est difficile à  dire mais c’est un sentiment
Avec des collègues pêcheurs, nous avons fait voir aux apprentis du
CFA cuisine de Giens qu’il y avait des poissons locaux, vendus frais,
à  des prix raisonnables, et qui étaient très bons. A force d’en parler,
le sabre commence à  être connu mais l’on vend toujours plus de
dorades et de langoustes !

Photo Sophie Hourdin-Marty

Darnes de sabre grillées

Je fais mariner, 20 mn
environ, des darnes de sabre de faible épaisseur (1 à 
2 cm) dans de l’huile d’olive à  laquelle j’ajoute du jus
de citron, du sel, du poivre et une ou deux feuilles
sèches de laurier-sauce émiettées. Je les cuis
rapidement à  la poêle ou à  la plancha de manière à 
ce qu’elles restent bien moelleuses.

Recettes de Michel Lavaix, patron pêcheur et prud’homme à  Carqueiranne.

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Carnet de voyage

Photo Isabelle Grémillet

« Deux auto-stoppeurs que nous prenons sur la côte du Sahara occidental au nord de Tarfaya : ce sont deux pêcheurs qui vont relever leur filet. Nous les accompagnons jusqu’au bord de la falaise et assistons à  un dangereux numéro d’équilibriste. Le plus jeune descend à  mains nues le long de la roche pour défaire le point d’amarrage de la corde qui tient le filet. Celui-ci est calé de manière à  « barrer ‘ la petite baie qui se découpe entre les caps.

Son ami, situé de l’autre côté, tire à  lui seul la corde et remonte un filet chargé de poissons. Nous descendons les rejoindre sur un replat pour découvrir le fruit de la pêche. Comme ils parlent français, nous en profitons pour discuter. Leurs pères ont pêché au même endroit, les femmes et les enfants sont « au Sahara » et eux sont là  pour gagner leur vie. Le plus âgé à  qui l’on pourrait donner plus de cinquante ans n’a que 38 ans, ça fait un choc ! Ils nous offrent deux petits poissons pour le déjeuner et nous aident à  équiper l’une de nos deux cannes à  pêche tout en nous donnant quelques conseils. Nous raccompagnons le premier des pêcheurs à  leur petite maison située au bord de la falaise, et le second à  la station service afin qu’il y dépose la récolte du matin.

Photo Isabelle Grémillet

Nous sommes invités à  repasser au prochain voyage et, si possible, rester quelques jours pour rendre visite à  la famille au Sahara. Ce sera avec plaisir et nous notons sur la carte le repère précis pour pouvoir retrouver l’endroit. Toutes nos amicales salutations si ce journal arrive jusqu’à  ces pêcheurs ».

L’impact du productivisme
dans les pays du sud

Ici et ailleurs, le productivisme ne connaît pas de frontières et fait fi de la vie des communautés artisanales de pêcheurs. En Mauritanie, au Sénégal, et en d’autres pays du sud, les difficultés des communautés de pêcheurs artisans s’exacerbent avec les captures massives des armements industriels d’origine asiatique ou européenne qui opèrent sous couvert d’accords de pêche, ou par le biais de « sociétés mixtes ‘.

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Bretagne : entre production alimentaire et environnement

Photo René-Pierre Chever Concilier les activités du secteur primaire – pêche, cultures marines, agriculture, élevage – avec un environnement
de qualité, tel est l’enjeu de la Bretagne, une voie déjà  amorcée par les pêcheurs et conchyliculteurs
tout au long du littoral.

Moins peuplées qu’en Méditerranée, les côtes bretonnes doivent pouvoir valoriser leurs « produits artisanaux issus de terroirs bien gérés ‘, sur d’autres marchés régionaux. Les infrastructures nécessaires au traitement et à  l’acheminement des produits de la mer sont rentabilisées par les tonnages des flottilles hauturières artisanales. C’est toute une cohérence régionale à  construire pour préserver une pêche durable et façonner un littoral attractif avec des ports animés, ancrés dans l’histoire et la culture.

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Méditerranée : intégrer pêches et cultures marines à  la spécialisation touristique et résidentielle

Une succession de marchés de vente directe, dans la lignée des marchés provençaux et une « Démarche qualité » pour rapprocher le consommateurs des « bonnes » pratiques de pêche »

Le guide des bonnes pratiques des techniques de pêche varoise recense des règles générales, et spécifiques à  chaque technique([Gangui, pêche aux thonidés et grands migrateurs, filets, casiers, palangres, pêche d’oursins)], pour respecter au mieux les prises, la ressource et l’environnement. Certaines sont incontournables, d’autres recommandées par les pêcheurs. Fondée sur une base volontaire, cette démarche est évolutive. Ci-après, quelques exemples :
– les déchets sont collectés et ramenés à  terre,
– les techniques sont adaptées pour éviter la prise de poissons sous-taille,
– les prises vivantes accidentelles, non commerciales ou protégées, sont rejetées,
– les pollutions et pratiques mettant en danger la ressource (braconnage, pétardements) sont signalées,
– un système d’attache de secours est prévu pour éviter la perte d’engins de pêche lorsque les signaux sont coupés par d’autres usagers

Photo Alain Ponchon

Un archipel de petites aires marines protégées gérées
avec les Prud’homies de pêche

Les aires marines protégées (AMP) sont-elles un outil de gestion pour la pêche artisanale, susceptible de les aider à  assurer leur avenir ? Telle est la question que s’est posée Catherine Seytre en rédigeant sa thèse de biologie marine, à  l’Université de Nice, sous la direction de Patrice Francour.

En comparant le cantonnement du cap Roux(Cantonnement créé en 2002 à  l’initiative de la Prud’homie de Saint-Raphaêl. Aux tombants de l’Estérel,
il est le plus grand de France continentale (5ha). Toute pêche (professionnelle et de loisirs) y est interdite.
) avec la réserve de Scandola (Corse) qui existe depuis 15 ans, elle observe un commencement « d’effet réserve ‘. Diminution de la variabilité saisonnière : les espèces « s’installent » ou fréquentent plus régulièrement la zone, en hiver comme en été. les résultats des pêches
Certaines d’entre elles, ciblées par la pêche, augmentent en densité et en taille. En attestent expérimentales réalisées avec un pêcheur professionnel. « Une AMP demandée par les pêcheurs professionnels, c’est rare » commentera l’un des membres du jury. Une thèse scientifique dont les méthodes et critères d’évaluation sont pensés au regard du dialogue avec les pêcheurs est également novateur

Une mosaïque de plans de gestion prud’homaux égrenée tout au long du rivage

Décryptage des règlements de la Prud’homie de Saint-Raphaêl

Décision démocratique d’une communauté de pêcheurs exerçant sur un territoire, validée par l’Administration et applicable à  tout pêcheur tiers qui viendrait travailler dans la Prud’homie. Les principaux objectifs sont les suivants :

1°) Maintenir la dimension « artisanale ‘ de la flottille et répartir l’exercice de la pêche sur le territoire afin d’éviter les conflits :
– les engins autorisés sont listés, les « grands métiers » n’ont pas cours (le chalutage est interdit au même titre que les arts trainants, les grandes sennes ne sont pas en usage), les limitations sur les conditions d’usage des métiers empêchent le développement de techniques intensives spécialisées et incitent à  la polyvalence des pêcheurs pour des techniques diversifiées,
– l’intensité de capture est plafonnée par bateau et par métier (longueur totale des filets utilisés, nombre maximal de casiers ou d’hameçons pour les palangres),

2°) Pérenniser l’activité de la communauté en préservant le renouvellement de la ressource sur le territoire :
– l’intensité de capture est plafonnée globalement et par métier : longueur totale des filets utilisés, nombre maximal de casiers ou d’hameçons pour les palangres
– sont protégés réglementairement les zones de frayères des rascasses, les langoustes et homards grainés, les juvéniles (taille minimale des mailles et hameçons),
– sont plafonnés les temps de trempage des engins dans l’eau afin d’éviter le rejet inutile de captures abimées,
– des périodes de pêche sont prévues pour certaines pêches côtières afin de laisser reposer les fonds.
– certains métiers exercés sur des postes de pêche bien identifiés donnent lieu à  un tirage au sort entre les pêcheurs lorsqu’ils sont en compétition pour les mêmes postes. Les pêcheurs régulièrement embarqués sont prioritaires sur les autres. Le calage se fait perpendiculairement à  la côte pour ne pas gêner les autres postes,
– les engins sont signalés et identifiés par des signaux visibles et marqués au nom du bateau,
– certains engins plus dépendants des conditions spatio-temporelles (filets de postes, petits filets dérivants) sont prioritaires sur d’autres,
– pour certains métiers, une distance dans le calage des engins doit être respectée afin de ne pas gêner l’efficacité du piégeage.

Avec une telle dynamique fondée sur la diversité des techniques exercées par des pêcheurs polyvalents, les limites d’absorption du marché local et la gestion collective de l’activité sur le territoire, les pêcheurs ne cherchent pas à  maximiser leurs captures jusqu’aux limites du territoire. Leur objectif est « de bien vivre de leur métier et d’en laisser à  leurs enfants » ; ils peuvent laisser reposer leurs pierres ou les espèces par des pratiques alternatives ; ils peuvent gérer individuellement leur activité sans se sentir lésés par les autres…

« Pescatourisme ‘
ou comment faire découvrir
le métier de la petite pêche
aux non-initiés tout en diversifiant l’activité du pêcheur ?

152 passagers ont embarqué cet été à  bord d’un des cinq bateaux de pêche professionnels lancés dans cette aventure du « Pescatourisme ‘ sous l’égide du Comité local des pêches du Var. Pour une matinée, ils ont participé au relevage des filets, palangres ou casiers et échangé sur un métier difficile, peu connu et souvent mal perçu des médias. L’Association Marco Polo, cheville ouvrière de ce projet lancé sur 3 ans, à  partir d’une expérience italienne, a déjà  à  son actif le développement touristique en milieu montagneux et la mise en place d’un forum international du tourisme solidaire. Son objectif : inscrire la petite pêche varoise dans le développement touristique littoral et, par cette diversification, l’aider à  mieux gérer ressources halieutiques et territoires de pêche. Il reste à  faire évoluer les conditions règlementaires d’embarquement qui imposent 2 membres d’équipage à  bord. Une réalité qui n’est pas celle de la petite pêche varoise exercée le plus souvent par un pêcheur seul embarqué.

Pour les quelques « grands ‘ bateaux, il est envisagé d’étendre la sortie à  la journée avec un repas concocté avec les produits de la pêche

Photo Philippe Joachim

L’implication des pêcheurs et prud’homies dans la préservation de leurs territoires

(liste non exhaustive des actions menées sur le littoral)

Gruissan : mise en réserve d’un étang par la Prud’homie

Palavas : 13 ans de lutte juridique pour préserver les étangs

Etang de Berre : lutte juridique contre le détournement de la Durance et le rejet d’eau douce et de limons

Carteau : rétablissement de l’arrivée d’eau douce par la coopérative des conchyliculteurs et la Prud’homie

Martigues : négociations avec le Port Autonome de Marseille pour le rejet des boues de dragage

Parc Marin de la Côte Bleue : réserves et récifs implantés en lien avec les Prud’homies de Marseille et Martigues

La Ciotat : aménagement d’une aire de mouillage, rôle de sentinelle de la Méditerranée

Parc National de Port-Cros : Charte de pêche professionnelle établie sur la base des règlements prud’homaux

Saint Raphaêl : création du cantonnement du Cap Roux par la Prud’homie

Corse : réserves de Scandola et Bonifacio gérées avec la coopération des prud’homies

FEP Varois : préparer l’avenir de la petite pêche côtière, dans un environnement préservé et en bonne entente avec les usagers du plan d’eau

En partenariat avec le WWF France, le Comité local des pêches du Var accède à  un outil européen pour construire et financer des projets, en concertation avec les usagers maritimes : pêcheurs de loisirs, plongeurs, chasseurs sous-marins, secteur touristique, collectivités territoriales Ces projets sont gérés par l’association « APAM ‘ (Association des Acteurs Varois pour une Petite Pêche Côtière et des Activités Maritimes Durables), nouvellement créée.
Ils ont pour finalité de :
– mieux connaître le milieu naturel et les pratiques de pêche,
– valoriser les produits et les métiers de la pêche,
– gérer le territoire en lien avec les différents acteurs et diversifier les pratiques de pêche,
– coopérer avec les autres groupes FEP à  l’échelle nationale et internationale.

Vous avez un projet qui rentre dans ce cadre, contactez Stéphanie D’Agostino
pour un soutien financier (FEP axe IV)
T. 04 96 11 69 42 e-mail : sdagostino@wwf.fr

Une formation adaptée à  la petite pêche : une expérience pilote varoise

Les nouvelles obligations définies au niveau national s’avéraient être un frein à  l’entrée dans la profession, sans être pour autant vraiment adaptées à  l’exercice des petits métiers varois. S’inspirant d’une expérience pilote menée à  La Réunion, le Comité Local des pêches du Var, a demandé aux Affaires Maritimes de mettre en place un « certificat de commandement à  la petite pêche ‘ moins coà’teux, moins long et d’un contenu plus approprié. C’est chose faite et la première session a démarré à  l’Institut de promotion et de formation aux métiers de la mer (83 – La Seyne sur mer) le 30 novembre dernier avec 14 apprenants ; certains pêcheurs dérogataires vont ainsi régulariser leur situation tandis que d’autres marins vont s’initier au commandement.

Ce certificat est valable pour un patron seul embarqué, effectuant des sorties de moins de 24 h et commandant un bateau de moins de 9 m et moins de 160 kw.

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Réforme de la Politique Commune des Pêches: un choix de société

Un choix crucial pour les pêcheurs artisans mais aussi pour les citoyens puisqu’il s’agit de savoir quel mode de développement sera érigé en «système’. A partir de l’analyse des Prud’homies de pêche et de leur histoire récente, trois orientations se dessinent :

1°) En continuité avec une dynamique productiviste et expansionniste, l’Union Européenne peut être tentée de privilégier les unités les plus performantes à  l’échelle européenne (des entreprises de dimension internationale sur des segments concentrés ou qui intègrent des opérations de transformation, de distribution et de négoce) en leur conférant la possibilité d’acheter et capitaliser des droits de pêche (quotas ou temps de pêche individuels et transmissibles) et d’exercer sur des zones extra-européennes par la négociation d’accords de pêche La ressource marine est vue comme un ensemble de « stocks ‘ à  gérer par le biais de modèles bio-économiques et de seuils de capture globale par espèce à  ne pas dépasser. Les mesures comprennent : des plans de casse de bateaux les plus anciens, une gestion globale à  partir d’un « marché ‘ de quotas, des mesures techniques généralistes

2°) Une préoccupation environnementale croissante pour le futur est portée par des partis politiques et des ONG de dimension internationale qui disposent de moyens de communication pour influencer les prises de décision politiques. Ce courant cherche à  préserver l’enchaînement complexe et diversifié des milieux naturels par la protection des espèces menacées et des habitats riches en biodiversité. Il engage des actions autour d’espèces emblématiques (dauphins, espèces des grands fonds) ou de « pourcentages ‘ de zones marines à  protégées (voire sanctuariser). En fonction des opportunités, il suscite des coalitions avec certains secteurs (pêche de loisirs), ou segments de pêche. Sous cet angle, la gestion des ressources, comme celle des espaces marins (littoraux), pourrait être confiée à  des directions européennes et nationales de l’environnement.

3°) Ce sont des régions qui vont construire la compétitivité de leurs territoires économiques, sociaux, environnementaux en les spécialisant à  l’échelle européenne. La pêche est alors intégrée dans l’économie régionale, à  charge pour l’entité régionale d’organiser l’accès aux ressources et zones marines. En Méditerranée, la qualité du littoral et des fonds marins est une richesse fondatrice d’une spécialisation orientée vers des fonctions touristiques et résidentielles. La pêche comme les cultures marines prennent leur place au sein de ce patrimoine maritime et les professionnels participent à  sa gestion. Sur les côtes rocheuses ou lagunaires, la « mosaïque ‘ de plans de gestion prud’homaux, égrenée tout au long du rivage et complétée d’un archipel de petites aires marines protégées gérées en lien avec les prud’homies, constitue la base d’une gestion régionale de la ressource et des territoires littoraux.

Chacun des modes de développement porte en lui-même ses « effets pervers’:

– La dimension « internationale ‘ des entreprises dans le premier cas, et notamment leur financement international, pourrait conduire à  une fuite des ressources et richesses européennes vers des pays extra-européens.

– La priorité accordée à  un groupe d’acteurs comme celui de courants environnementalistes, sans considération des cohérences économiques, sociales et environnementales de terrain, pourra aboutir à  des résultats contre-productifs. Ainsi, le bilan environnemental de l’impact de l’interdiction de la thonaille méditerranéenne au titre des filets dérivants pourrait bien être négatif du fait du report des captures sur les espèces littorales.

– Des spécialisations régionales très abouties pourraient à  terme se passer d’une cohérence européenne mais ce risque est encore loin devant nous !

Des dynamiques exclusives et porteuses de choix de société

– Ouvrir le secteur de la pêche à  un développement capitalistique qui n’a pas de limites territoriales reviendra, dans un contexte de raréfaction de la ressource et de demande croissante, à  marginaliser grandement le segment artisanal. Par ailleurs, l’appréhension du domaine maritime, sous l’angle du plancton et des interactions entre les espèces, montre qu’une segmentation spatiale entre « grands ‘ et « petits ‘ métiers n’a pas de réel fondement écologique tant les espèces du large sont dépendantes de la gestion côtière, et les espèces benthiques dépendantes des espèces fourrages constituées par les petits pélagiques.

– Le courant environnementaliste, en s’attaquant à  des cibles successives, sape les conditions même de la rentabilité des pêches artisanales polyvalentes fondées sur la diversité des espèces et des produits commercialisés. Ce mode de développement subordonnera le segment artisanal qui devra essayer de « négocier ‘ pas à  pas les conditions de sa survie.

– Le développement de régions maritimes spécialisées dans l’Europe devrait pouvoir intégrer une bonne part des pêches artisanales associées à  leurs formes de gestion collective (comme celle des prud’homies).

Parce qu’il se fonde sur le tissu social, sur les organisations professionnelles, sur les associations citoyennes qui composent son territoire, en les mobilisant autour d’un objectif commun en lien avec les spécificités environnementales, ce mode de développement régional est celui qui est le plus proche des hommes, de leur ancrage économique, social, environnemental et politique.

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Aperçu planctonique d’une goutte d’eau prolifique

« A première vue, ça grouille. Il y a des formes noires fixes, d’autres bizarres qui traversent l’écran, parfois avec des cils, cela ressemble vaguement à  des coléoptères qui auraient des cils à  la place des pattes. D’autres semblent géométriques, plus petites parfois ; leur transparence laisse deviner des éclats, des reflets métalliques proches des œuvres de joailliers. Ils se détendent comme des ressorts, découvrent des spirales qui, selon la prise de vue, se transforment en cercles concentriques. D’autres formes plus inégales rappellent vaguement les « paramécies » des lointaines leçons lycéennes.

De l’infiniment petit surgit la vie déjà  diversifiée,
en voie de multiplication ou de simplification,
un tapis roulant où se découvrent
les innombrables imbrications
de la chaîne alimentaire…

Diatomée

Photo Pierre Mollo


– L’une des très nombreuses espèces de diatomée dont la présence est souvent associée à  une bonne qualité du milieu. Rien de
tel pour la biodiversité !

Copépode

Photo Pierre Mollo


– Plus du 80% du plancton animal (zooplancton) est constitué des crustacés copépodes

– Larves d’oursins : beaucoup serviront à  nourrir les poissons d’autant plus qu’elles n’ont pas encore d’épines !

Diatomée

Photo Pierre Mollo

– Une diatomée qui ne manque pas d’air puisqu’à  l’origine de l’oxygène

– A peine 10 mois de vie planctonique avant que cette larve de langouste ne se transforme en bébé langouste

larve de langouste

Photo Pierre Mollo

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L’encre de mer n°24-25

Au sommaire de ce numéro :

Les côtes nord de l’Espagne : un peuple de pêcheurs

Aperçu planctonique d’une goutte d’eau prolifique

Réforme de la Politique Commune des Pêches : un choix de société

Méditerranée : intégrer pêches et cultures marines à  la spécialisation touristique et résidentielle

Bretagne : entre production alimentaire et environnement

Pêche artisanale et développement régional
Gérer la mer au cas par cas

Carnet de voyage

Collectif Pêche et Développement et la pêche artisanale sénégalaise

37ème festival mondial de l’image sous-marine à  Marseille

Recettes de sabre

Supplément :

Les poissons font-ils l’amour ?

Ce que la Prud’homie de pêcheurs nous apprend

Quelle leçon tirer de 50 ans de productivisme ?

A propos des règlements prud’homaux de St Raphaêl

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